Version HTML ?



Un autre monde

Rolanya m’avait emportée et pourtant je restais immobile, suspendue dans un espace temps qui ne m’appartenait pas. Je voyais les maisons d’Atta Echtele se rapprocher vivement au bout de la route, j’entendais le martèlement des sabots de ma jument et le halètement cadencé de Frère Loup. Je flottais dans un monde éthéré, dans un détachement total, et rien ne pouvait m’atteindre. Dans le village, la lutte était acharnée. Radagast, entouré par une poignée d’hommes valides, défendait l’entrée d’une grange où s’étaient réfugiés les femmes, les enfants et les vieillards.
Un peu plus loin Gandalf, monté sur Gripoil, émergeait seul d’une marée d’Orques ; autour de lui en un ballet sauvage, des aigles, des buses et des éperviers tourbillonnaient sans cesse, attaquant les Orques des serres et du bec. Kyo s’élança pour se joindre à eux.
Rolanya, Frère Loup et moi, nous nous dirigeâmes vers Radagast, prenant les Orques à revers. Mon corps se battait comme un automate et mon esprit vagabondait, planant bien au dessus de la mêlée. Toujours la guerre, toujours la mort... Je regardais ces visages difformes et laids, ces petits yeux troubles, ces cous épais, ces corps tordus de peur ou de souffrance. Ils allaient au massacre parce qu’ils redoutaient plus leur sinistre Maître que la Mort elle-même. Leur vie n’était que terreur, fuite, douleur. Avaient-ils des moments de bonheur ? Quand ils apaisaient leur faim, quand ils étanchaient leur soif, quand ils sombraient dans un sommeil opaque où le rêve n’avait pas de place ? Ou bien rêvaient-ils ? Se voyaient-ils, le temps d’un songe, jeunes, beaux, braves et purs, animés de nobles sentiments et d’idéaux généreux ? S’imaginaient-ils libres comme des oiseaux dans le ciel du soir, planant interminablement dans la main rassurante du vent, ivres du plaisir simple d’être et de voler ?
Du sang coulait de leurs blessures. Noir et fétide, certes, mais c’était du sang. Leur bouche se tordait quand ils avaient mal, et leur agonie était gémissante et apeurée. Mais alors pourquoi ? Pourquoi cette noire magie, pourquoi les Ténèbres, pourquoi la mort...
Je tuais des Orques parce qu’il plaisait à Oromë, mais puisque la mort est la seule issue, peut-être serait-il plus miséricordieux de tuer les Humains, pour leur éviter toute souffrance... Tuer était sans doute dans ma nature, Oromë ne m’avait jamais demandé autre chose ; je pouvais tuer de jour ou de nuit, ivre ou à jeun, reposée ou fatiguée, triste ou joyeuse, je n’avais même pas besoin de réfléchir, mon corps savait d’emblée comment esquiver et où porter le coup mortel. J’avais vu des hommes se troubler, vomir, défaillir à la vue d’un cadavre. D’autres s’enfuyaient à l’idée du moindre affrontement, et certains – étrange, en vérité – prêchaient que la violence n’était jamais la solution, et se laissaient tuer sans opposer de résistance. Et j’avais vu aussi des hommes prendre plaisir à infliger la torture et la mort, s’imaginer tout-puissants parce qu’ils tenaient une arme à la main, mépriser le faible, piétiner le cadavre, mutiler la dépouille avec une cruauté inutile dont aucun animal ne serait jamais capable.
Je ne ressemblais à personne. Je tuais, et je n’en tirais ni bonheur ni gloire – ni douleur. Si j’avais tué des hommes j’aurais été un monstre à l’égal de Sauron, mais parce que je tuais des Orques, des démons et des assassins, j’étais une héroïne respectée et adulée.
Tout ceci n’avait pas de sens. Un coup mortel était toujours un coup mortel. Un Orque était un être vivant. Et moi je n’étais qu’un jouet dans la main d’Oromë, impuissante et dérisoire.
Mon bras s’était arrêté un instant dans son élan. Rolanya me bouscula d’un coup d’épaule, et la lame de mon adversaire frôla à peine ma joue au lieu de me pourfendre. Je sentis comme dans un ballet d’ombres au dessus de ma tête Rolanya contacter Radagast et celui-ci lui répondre par l’esprit. Puis sa voix dans ma tête me salua, m’exhortant à plus de prudence.
« Prends garde à toi ! Tu t’exposes trop ! Fais mouvement vers la droite, nous nous rejoindrons plus vite... »
En même temps mon esprit embrumé s’éclaircissait, mes pensées se tarissaient, une sorte de paix lumineuse m’envahissait. Je me battais pour une juste cause et cela était bien ainsi. Le jour finissait toujours par triompher de la nuit et les peuples d’Arda s’uniraient pour vaincre le Seigneur des Ténèbres. Il n’y avait pas de place pour le doute, tout était bien, tout était...

Je buvais une chope de bière fraîche que m’avait versée une toute jeune fille aux longues nattes blondes. Je sentis le regard de Radagast sur moi.
« Nous avons gagné ?
- Oui.
- Ca fait longtemps que le combat a cessé ?
- Presque une heure.
- Pourquoi je ne me souviens de rien ?
»
Gêné, il détourna les yeux et vint s’asseoir près de moi.
« Ecoute, tes pensées vagabondaient, tu devenais imprudente... Je t’ai assujettie... temporairement. »
Je souris faiblement. Lui le champion des libertés, défenseur acharné du libre arbitre, il avait réduit ma volonté à celle d’un objet – certes, pour me sauver la vie.
« Il ne faut jamais dire « fontaine »...
- Mernenye varyate (1) !
- Autrefois tu aurais préféré me voir morte... »
Il baissait les yeux, terriblement inconfortable.
« Mais je ne te reproche rien. Je sais que tu l’as fait pour mon bien. Le temps nous change tous, et certains en bien pire que toi. Quand je raconterai ça à Maedlin...
- ‘Roquen, tu ne peux pas, il est...
- Il est mort, oui je sais, pour l’instant. Mais il ne restera pas mort éternellement.
- Tu es fatiguée, je crois... »
Maedlin se tenait près de la porte de la grange. Je lui fis signe d’approcher mais il secoua la tête en souriant et disparut.
« Il nous rejoindra tout à l’heure, je pense. Il n’a pas voulu nous déranger.
- ‘Roquen... Je vais te chercher quelque chose à manger, et ensuite tu devrais dormir un peu. Rolanya s’est déjà installée dans le fond, là-bas, et je veillerai à ce qu’on ne te dérange pas.
- Je n’ai rien à craindre, tu sais, Maedlin sera près de moi. »

Dès que j’eus fermé les yeux, Maedlin était bien là, plus souriant, plus lumineux que jamais.
« Quand tu te seras reposée », me disait-il, « nous partirons vers le sud. J’ai un ami à Osgiliath qui a besoin d’aide pour débourrer ses chevaux.
- Ce ne sera peut-être pas possible tout de suite. Radagast m’a appelée en renfort, par ici il y a une grande offensive Orque. »
Maedlin fronça le sourcil.
« Avec tous ceux que vous avez tués, il y en a encore ? Bon, s’il le faut nous nous retarderons de quelques jours. Dors maintenant, et rappelle-moi demain d’acheter des pommes. »
Je m’éveillai en marmonnant « acheter des pommes », et je sautai sur mes pieds, mue par l’impérieuse nécessité de trouver ces fruits pour Maedlin.
« Tu ne veux pas boire quelque chose de chaud avant de partir ? », demanda Frère Loup qui aurait trouvé tous les prétextes pour ne pas quitter son coin de paille.
« Tout à l’heure. Maedlin aura sûrement fait du feu quand je reviendrai.
- Je t’accompagne », bâilla-t-il. « Mais tu devrais laisser un peu Maedlin tranquille.
- Je ne lui demande rien ! C’est lui qui ...
- Où vas-tu ? », m’interrompit Radagast qui venait de se réveiller.
- « Chercher des pommes pour Maedlin. »
Radagast affichait un air sombre et vaguement inquiet.
« ‘Roquen, viens t’asseoir. Je sais que c’est extrêmement pénible pour toi, mais... »
Je me dégageai en souriant poliment.
« Oh, arrête ! Je ne suis pas stupide ! Je sais que Maedlin est mort. Mais ce n’est pas une raison pour le priver de pommes ! »
Je me détournai. Je sentis dans mon dos Radagast se redresser et se concentrer. Je fis volte face brusquement et levai un mur de protection.
« Pas question de m’assujettir à nouveau, et dans mon dos, en plus ! Je ne suis pas en plein combat, je ne suis pas en danger !
- Mais je voulais juste...
- Bien sûr. Discuter. Je n’ai pas envie de discuter. Il n’y a rien à en dire. Il faut que je trouve des pommes.
- Ne t’éloigne pas trop. Un détachement d’Orques est à deux lieues d’ici, selon les Grands Aigles, et un Nazgûl a été vu à cinq lieues à l’est. Nous devons nous concerter avec Gandalf pour mettre en place...
- Mais oui, mais oui, la Stratégie, le Plan de Bataille, l’Optimisation des Positions Défensives... Ca peut bien attendre que j’aie trouvé mes pommes, non ? D’une manière ou d’une autre, il restera encore des Orques à tuer... »

Je revins au petit trot, mon sac de pommes sur l’épaule. Maedlin était à mes côtés, l’allure d’Alcar calquée sur celle de Rolanya.
« Je peux avoir une pomme ?
- Ata (2) ? Na ea canya (3) !
- J’ai faim ! Hier soir j’étais trop fatigué pour manger. »
Je lui lançai le fruit en riant, et il le dévora à belles dents. Le sac était à moitié vide quand nous atteignîmes le campement.
« J’ai à faire », me sourit Maedlin, et il disparut.
Radagast m’attendait.
« Les Orques ne seront là que demain. Que dirais-tu d’une partie de chasse ?
- Bien sûr, si Maedlin est d’accord. »
Il ouvrit la bouche pour me répondre, la referma, soupira, me lança un regard sombre et désarmé et tourna les talons. Etait-il jaloux ?
« Tu devrais le laisser partir », me suggéra Frère Loup.
- Qui ?
- Maedlin.
- Mais il ne souhaite pas partir ! Il me l’aurait dit. Il n’y a pas de secret entre nous. »
Frère Loup se planta devant moi, ses yeux fauves de loup libre dans mes yeux d’Istar en deuil – Rolanya était à côté de lui, son esprit tendu vers moi de toute l’intensité de son amour, et Kyo posé délicatement sur sa tête manifestait son total accord à la position des deux autres.
« C’est toi qui le retiens. Et il t’aime trop pour te contrarier. Mais Mandos l’attend, et tu le sais. Tu n’as pas le droit de le transformer en âme errante seulement parce que sa mort te fait trop de peine. »
Je les regardai, tous les trois, déterminés et sages. J’éclatai de rire.
« Mais bien sûr ! Mandos l’attend ! Et moi je l’oblige à manger des pommes ! »
Je leur tournai le dos et partis marcher seule aux alentours du village. Je sentais leur présence me suivre de loin, inquiète et pourtant bienveillante. Je m’assis au bord du ruisseau et tout à coup une grande fatigue me couvrit les épaules. Je m’allongeai en bâillant dans l’herbe fraîche et je fermai les yeux.
Je n’avais jamais vu une telle lumière. Elle n’était pas douloureuse comme la violence des éclairs ; elle n’était pas dangereuse comme la brûlure des brasiers. Cette lumière avait une âme, elle était brillante et chaleureuse, étincelante et affectueuse, vivante et généreuse... Elle baignait une immense plaine recouverte de foin odorant où broutait Alcar. Rolanya n’était pas là. Maedlin caressait l’encolure de son cheval. Il se tourna vers moi.
« ‘Roquen... »
Son visage était grave et sa voix rauque cassée par l’émotion.
« Oromë... m’a proposé de... m’accueillir en Valinor. Il dit que je pourrais t’y attendre. Est-ce que... tu te souviens de Valinor ? »
Je fronçai les sourcils.
« Je me souviens... d’une certaine lumière... mais pas comme celle-ci... et d’une certaine paix... mais avec moins de plénitude... et il y avait l’éternité, aussi, mais... je ne sais pas pourquoi, c’était... fade... Tout cela est très flou. Tu sais bien qu’Oromë a effacé ma mémoire quand je suis venue en Arda.
- Et pourquoi ?
- Tu lui demanderas. Peut-être voulait-il m’éviter d’avoir des regrets.
- Donc ça serait un endroit agréable ? »
Je haussai les épaules.
« Les Valar y vivent...
- Si les Valar peuvent s’en contenter... Je ne te cache pas que cette proposition me tente. Comparé aux demeures glaciales de Mandos... »
Je le buvais des yeux. Il posa sa main sur mon épaule.
« Je n’ai jamais souhaité te laisser seule. Si tu le veux, je resterai près de toi.
- Une âme errante, sans espoir de repos...
- Non. Ton ombre. Ton reflet. Une partie de toi. Mais... » - il cligna d’un oeil coquin - « ça t’obligera à me rester fidèle. »
Je ne répondis pas. Je ne pouvais pas. D’innombrables larmes me brouillaient la vue. J’aurais souhaité que quelqu’un ôte ce fardeau qui écrasait mes épaules. Qu’on me dise ce que j’avais à faire, qu’une divinité toute-puissante, Oromë, ou même Iluvatar en personne, m’impose sa volonté et que je n’aie plus qu’à me coucher et à obéir. Mais il n’y avait que lui et moi dans cette lumière resplendissante et pure, comme le visage d’un nouveau-né, comme la source au sortir de la terre, comme le vent sucré du soir.
Je souris de toutes mes forces réunies.
« Va. Je te rejoindrai dès qu’Oromë m’autorisera à le faire.
- Tu crois vraiment ? Je ne vais pas te manquer ?
- Tu me manqueras. Mais j’ai une mission à remplir. Tu m’as aimée, et ton souvenir m’aidera à tenir. J’y arriverai. »
Il effleura ma joue, et il me sourit en penchant un peu la tête sur le côté, comme il savait le faire quand il voulait me demander quelque chose. Je sentais la vague monter, irrésistiblement séduisante, je n’avais qu’à lui céder, à m’effondrer devant lui pour qu’il accepte de rester... Je fis appel à la force qu’il faut pour soulever une montagne, à celle qui permet de garder la tête hors de l’eau quand on a lutté dans la tempête un jour entier et une nuit, à l’énergie sauvage qui assassine sans remords un agresseur, quel qu’il soit, qui nous met en danger. A tout ce qui me restait de vie et de volonté. Parce que si j’en mourais c’était la plus belle des récompenses.
Et je n’en mourus pas.
Pas une larme ne franchit le seuil de mes paupières, tandis qu’un crépuscule doré remplaçait la vive et merveilleuse lumière de cet étrange monde. A mes oreilles la voix de Maedlin répétait en échos de plus en plus lointains « Tye-melane (4), ‘Roquen, tye-melane... ».
C’était fini. Marië (5).

Je m’éveillai au bord du ruisseau, percluse de courbatures et les yeux brûlants. Je soupirai. Fatiguée ou non, il me fallait me lever, regagner le camp, fourbir mes armes pour la bataille du lendemain, et me battre, tuer encore et encore, quand je n’aspirais qu’à me coucher et mourir, pour le rejoindre enfin...
Je posai la main sur le sol pour me relever, et sous ma main une sensation de picotement... Je levai les yeux.
«Et tu croyais que j’allais partir comme ça ? Tu as toujours renoncé à tout, tes désirs sont toujours passés en dernier, et tu croyais que j’allais accepter ce dernier sacrifice ? Il n’y a pas que toi qui saches aimer, ‘Roquen. Il n’y a pas que toi qui sois prête à aller trop loin pour l’amour de l’autre. Si je reste une âme errante, tant pis. Tout le temps que tu demeureras en Arda je serai à tes côtés. Ah, dommage, tu n’auras pas d’autre amant ! Je n’étais pas trop jaloux de mon vivant, mais depuis que je suis mort... Mais tu es encore plus pâle que moi ! Respire, melininya (6), respire, je suis un gentil fantôme... Souris... Là, c’est mieux... »
J’étais tellement émerveillée que j’en oubliai de verser toutes les larmes de joie et de reconnaissance qui me submergeaient le coeur. J’aurais voulu lui dire quelque chose de fort, quelque chose d’intelligent, de sensé, de cohérent, d’inoubliable... Et bêtement, je ne pus que murmurer, d’une voix rauque et hachée comme celle d’un homme ivre :
« Mais... cette lumière... ce monde... ce n’était pas Valinor ? »
Il haussa les épaules en éclatant de rire.
« Valinor ? Avec cette puissance de joie, cet éclat formidable, cet absolu de bonheur ? Même les Valar ne sont pas capables de le créer... C’est le monde de l’Amour, celui qu’inventent ceux qui s’aiment vraiment... C’est là que je vis, et c’est là que tu me rejoindras... Dans la pure lumière d’Iluvatar lui-même... Hein, pas mal, pour un Elfe quelconque... »
Je béais. D’extase, d’admiration, de surprise illuminée... Mais sa voix joyeuse et insolente me sortit de ma transe.
« Il faut qu’on rentre, maintenant, tu sais, pour le Conseil des Offensives de Je ne Sais Plus Quoi... enfin les Choses Sérieuses de la Guerre... Il te reste une pomme ? »

Sin simen, inye quentale equen, ar atanyaruvar elye enyare. Oromë valuvar, yeva ata min. (7)

N.d.A.

(1) : Je voulais te protéger
(2) : Encore
(3) : Mais c’est la quatrième
(4) : Je t’aime
(5) : Tout allait bien
(6) : ma chérie
(7) : Ici et maintenant, je vous ai conté ce récit, et vous le raconterez à votre tour. S’il plaît à Oromë, il y en aura encore un autre.

Ecrire à Narwa Roquen
© Narwa Roquen



Publication : 24 mai 2010
Dernière modification : 28 mai 2010


Noter cette page : Vous devez vous identifier pour utiliser le système de notation

A toi de choisir parmi les récits et illustrations sur le site

FitzChevalerie Loinvoyant
Paradis lointain
Narwa Roquen
Et avec nos Esprits  
Un autre monde  
Pandöra
Genèse  

signifie que la participation est un Texte.
signifie que la participation contient un Dessin.


1 Commentaire :

Netra Ecrire à Netra 
le 24-05-2010 à 20h27
T'es vraiment atroce, toi !!!
Non mais quand même, un reflet... C'est horrible !!! Beau certes mais horrible !!!

Sinon ben j'ai bien aimé le côté flou et fantomatique de l'ensemble, et... Pour un Roquen, c'est court ^^


Ajouter un commentaire

Pseudo
Mail
Titre ou commentaire concis
Commentaire détaillé
(Optionnel)



Page générée en 1768 ms - 711 connectés dont 2 robots
2000-2024 © Cercledefaeries