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Le Récit des Jours

Prologue : les Premières lueurs de l'Aube

Le soleil émergeait lentement derrière les collines vallonnées d'Ambrelune, chassant avec douceur le noir opaque de la nuit. Au château royal, l'effervescence atteignait son comble dans la chambre à coucher. Après une nuit presque entière de douleur, la reine arrivait aux dernières contractions, signe de délivrance et de bonheur à venir. En sueur, le visage blanc grimaçant, elle serrait de toutes ses forces la main de son époux, lui communiquant un peu de sa souffrance mêlée de joie. Le sang maculait les draps auparavant si propres et la sage-femme commençait à s'inquiéter, sans oser le montrer. Enfin la tête du bébé daigna apparaître, bientôt suivie par le reste du corps. C'était une fille. Elle hurla et cria sa vie. Une des servantes la prit délicatement pour la laver. Lorsque l'enfant se tut, un épais silence tomba dans la pièce. La sage-femme et ses aides se retirèrent sans bruit, laissant le roi seul, prostré : la reine était allongée, un sourire discret perçant à peine derrière un masque de douleur. Les deux époux se tenaient encore la main. Le roi embrassa tendrement sa femme, promettant de s'occuper de son enfant et de l'aimer pour deux. La reine était morte.

Dehors, le soleil finissait de se réveiller, couvrant la terre de sa lumière. Les animaux commençaient à s'activer, qui sortant de son terrier en quête de nourriture, qui chantant pour saluer la venue de l'astre. Les hommes aussi s'en allaient vaquer à leurs occupations, tantôt dans les champs, tantôt dans leurs échoppes. Une belle journée s'annonçait, et ceux qui le pouvaient se préparaient à la passer en promenade. Peut-être pousseraient-ils leur balade jusqu'à la frontière de l'extrême nord du royaume, où herbe et rochers se partageaient un paysage montagneux désert mais splendide, dans l'espoir d'apercevoir les elfes légendaires qu'on disait habiter la région. Une journée, en fait, comme Ambrelune en connaissait beaucoup, agréable et paisible. Le royaume s'entendait bien avec ses voisins, bénéficiait d'un climat favorable et profitait de la politique éclairée de ses dirigeants. Ce n'était certes pas un pays idyllique ; il avait ses problèmes et ses misères, mais les gens vivaient plutôt bien dans l'ensemble, et tenait le couple royal en haute estime. Une journée, donc, qui aurait pu être belle. Mais le Destin en avait décidé autrement : la reine était morte.

Le roi se leva finalement, se séparant de celle qu'il aimait, et sortit de la pièce. Dans le couloir, la sage-femme attendait respectueusement, tenant le bébé dans ses bras. Délicatement bercé il dormait, drapé dans des langes à la blancheur immaculée. Déjà le château avait appris la nouvelle. Pourtant nul bruit, nul écho ne parcourait l'immense demeure de pierre. La joie de la naissance d'un enfant s'effaçait derrière la douleur de la mort d'une femme aimée de tous. Le roi prit sa fille dans ses bras, la regarda et, malgré sa tristesse, sourit devant tant d'innocence et de beauté fragile. Il l'aimait, malgré ce qu'avait entraîné sa naissance. Des hérauts franchirent le pont-levis, partant dans toutes les directions pour informer les gens du royaume que leur reine n'était plus, mais qu'elle avait laissé une fille derrière elle. Continuant à bercer l'enfant, le roi Blador se dirigea vers la grande salle d'audience du palais où s'étaient rassemblés la plupart des habitants du château. Quand il arriva, la cour forma une allée silencieuse qui menait jusqu'au trône à côté duquel avait été placé un magnifique berceau. Blador confia l'enfant à sa nourrice qui s'empressa de le laisser reposer dans son lit douillet. Le bébé s'endormit presque aussitôt. Le roi scruta l'assemblée, et confirma la nouvelle : "la reine est morte en donnant naissance à une fille."

La cour, d'ordinaire si bruissante et affairée, se retira respectueusement par égard pour la tristesse du roi. Resté seul, ce dernier soupira en s'affalant sur son siège. Il sentit une présence et se retourna : Vildya, son étrange et discrète conseillère, venait d'entrer par la porte dérobée cachée derrière les imposantes tentures recouvrant le mur du fond.

"Je n'ai pas vu le connétable parmi l'assemblée, dit le roi.
- Galatharn est parti chercher Lucain dans les Hautes Terres du nord. La reine a choisi ce dernier comme parrain pour l'enfant à venir. Selon la tradition ambrelune, la mère étant morte en couche, c'est à lui de choisir un nom pour le nouveau-né.
- Lucain est un personnage insaisissable ; existe-t-il seulement ? Et Galatharn pourra-t-il le trouver le cas échéant ?
- Lucain existe, soyez-en sûr. Et aussi difficile soit-il de le trouver, je fais confiance à Galatharn. Votre connétable est parti très tôt ce matin, dés qu'il a su que la reine risquait de rendre son dernier soupir."

Vildya se tut : une rumeur d'agitation provenant de la cour intérieure du château vint troubler le silence de la pièce. Un messager se précipita vers le roi, suivi par une série de nobles intrigués.

"Majesté, le sire Galatharn, connétable du royaume, vient de passer l'enceinte de Fortcarré. Il est accompagné d'un cavalier que personne ici n'a jamais vu, et qui se fait appeler Lucain."

Le messager ne put continuer de parler : quelqu'un annonça l'arrivée du connétable. A nouveau, le silence s'installa dans la vaste pièce, tandis que les silhouettes de deux hommes se découpaient dans la lumière du jour que laissait passer la grande porte.

Galatharn, portant les habits beige et vert de la garde royale, s'arrêta à l'entrée de la salle d'audience, les bras croisés. L'homme qui l'accompagnait, tout de vert et de noir vêtu, avança vers le trône. Ses vêtements, résistants et conçus pour le voyage, ne montraient aucun signe visible de richesse, mais n'ôtaient nullement l'aura de majesté qui se dégageait naturellement de celui qui les portait. Il inclina la tête devant le roi, en signe de respect, puis s'approcha du berceau.

"- Je vous souhaite la bienvenue, messire Lucain. Il me tardait de vous voir arriver. A vrai dire, je doutais de votre existence.
- Me voilà à présent devant vous. La mort de la reine est une bien triste nouvelle ; mais la naissance d'un enfant est une joie qui surpasse tout le reste.
- La reine vous ayant choisi comme parrain, il vous appartient de donner un nom à cette enfant.
- Soit ; je l'appellerai Cymbeline, ce qui dans ma langue veut dire 'espérance surgit des ténèbres'. Car tout comme sa mère est morte à l'aube au moment d'enfanter, cet enfant sera porteur d'un espoir au moment où tout semblera perdu. Les légendes l'appelleront la Dame de l'Aube.
- Voilà un nom riche de sens. Et qui a le mérite d'être agréable à l'oreille. Alors qu'il en soit ainsi."

Lucain s'inclina devant le roi puis repartit. La foule se dispersa à nouveau. Blador s'approcha du berceau et regarda son enfant d'un air doux et triste. Vildya passa autour du cou du nouveau-né le médaillon circulaire en or serti d'un saphir à la surface lisse représentant la pleine lune, emblème du pays qui se transmettait depuis sa fondation. La reine était morte, mais elle vivait au travers de sa fille : avec la naissance de la Dame de l'Aube, un nouveau chapitre de l'Ecriture des Destins commençait.




Publication : Inconnue
Dernière modification : 07 novembre 2006


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Prologue
Les Premières Lueurs de l'Aube
1er Chapitre
Le Conseil Restreint
Partie 2
Partie 3
Partie 4
Partie 5
Partie 6
Partie 7
Partie 8
Partie 9
2nd Chapitre
La Chute de Fortcarré
Partie 2
Partie 3
Partie 4
Partie 5
Partie 6
2nd Chapitre
Partie 7
3ème Chapitre
Les Trois Fuyards
Partie 2
Partie 3
Partie 4
Partie 5
Partie 6
Partie 7
Partie 8
4ème Chapitre
A Travers les Hautes Terres
Partie 2
Partie 3
Partie 4
Partie 5
Partie 6
Partie 7




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