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 WA, exercice n°124 Voir la page du message 
De : Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen
Date : Jeudi 3 octobre 2013 à 23:59:19
Dans la série " Les défis de la WA" voici un nouveau challenge qui pourrait bien vous occuper quelque temps. Votre texte commencera ( sans introduction) par la description minutieuse jusqu'à l'extrême d'un visage, masculin ou féminin, à votre guise.
Il vous restera alors à tisser une histoire autour de ce visage, sans omettre d'expliquer pourquoi cette description était si importante.
Je vous conseille de travailler sur une photo. L'idéal serait que quelqu'un connaissant cette personne puisse l'identifier grâce à votre description. Par ailleurs comme pour tous les moments descriptifs ( statiques par essence), usez de tous vos artifices pour ne jamais ennuyer le lecteur!
Vous avez la liberté du genre littéraire, et avec mes encouragements quatre semaines, soit jusqu'au jeudi 31 octobre.
Je suis sûre que vous réussirez encore une fois à émerveiller vos lecteurs ( qui sont juste trop timides pour vous le dire!)
Narwa Roquen, quand on ne sait pas par quel bout commencer, c'est très simple: toujours en haut et à gauche


  
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Réponses à ce message :
Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-11-01 18:11:19 

 WA - Participation exercice n°124Détails
Pour un fois, j'ai essayé d'être concis. Et j'ai quand même un peu respecté la consigne. J'avais deux textes très voisins, sur la même variation. Celui-là possède en plus un sens actuel qui a fait pencher la balance.

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La bande-son...
LE MEDAILLON



Si je ferme les yeux, je revois parfaitement les traits de l’homme que j’aime.

Son visage est aussi tranquille qu’une lune qui se mire dans le bassin du château quand la nuit est pure et les étoiles brillantes. Il n’y a aucune cassure, aucune brisure, aucune aspérité qui sont la marque des caractères jaloux, emportés ou ombrageux. Non, le soleil de ma vie m’a réchauffée, moi, la petite provinciale naïve, ignorant tout des rouages mystérieux qui président aux mouvements des corps célestes. Il m’a attirée à lui sans même s’en rendre compte, comme l’astre du jour, indifférent, retient les planètes inférieures en une course circulaire autour de sa splendeur. Durant cet étrange ballet aérien, contre toute attente, le Feu a fini par trouver quelque charme à un petit et obscur satellite. Celui-ci, sans crainte de se consumer en s’approchant trop près de cet auguste amant, a répondu à ses avances. Je n’en rougis pas. Mon amour est sincère et désintéressé.

Alors oui, il a le visage rond. Il ne pourra pas s’en départir, même entre les dents de ces heures cruelles et funestes. Mais son front est large et noble, harmonieusement galbé, doux sous mes baisers. Quand je partage sa couche, j’aime à caresser ses cheveux d’or soyeux, souples et parfumés. Rares sont les moments où il peut se permettre de les laisser ainsi librement flotter. Pourtant ils transfigurent son visage et le rendent plus jeune, moins lointain, plus humain enfin. Telle est la marche de ce siècle où tout doit obéir à des codes contraignants. Bien que je tremble pour lui et pour nous, je forme en secret des voeux pour que le vent de liberté qui souffle aujourd’hui sur le royaume allège le poids des chaînes, visibles ou invisibles, qui mordent nos chevilles et muraillent nos âmes. L’Amour ne nous rend pas forcément aveugle à ce qui nous entoure même si l’objet aimé demeure le centre de notre existence.

Sous des sourcils affirmés, ses yeux ont la couleur du bleu de porcelaine, doux et pâle. Ils ont une douceur alanguie et presque féminine, ce qui a aussi contribué à accréditer la fable que celui que j’aime est faible et dominé par son épouse. Mais je peux à présent révéler ce que je voyais, moi, dans ces yeux, alors que mon destin avance désormais à grands pas. A la lumière chaude des chandelles qui brûlaient au coeur de nos nuits trop courtes, ils s’enténébraient de désir juste avant que le brûlot du plaisir ne les rende plus lumineux qu’un soleil de minuit. Alors ses paupières se refermaient pudiquement sur des vestiges humides.

Son nez est fort et puissant, trait commun à tous les membres de la lignée. Il n’est pas orgueilleux et dominateur comme celui de son quadrisaïeul ou jouisseur et libertin comme celui de son grand-père. Non. Ses lignes sont pleines et ses narines sensuelles. Il apporte un équilibre à la rondeur du visage et l’empêche d’être empreint d’une trop grande mollesse. C’est un arc-boutant autour duquel tout s’organise. La proue majestueuse qui fend les flots devant le navire amiral. Il est à la mesure de la haute stature de mon Amour que tous ses détracteurs s’ingénient à réduire, comme pour mieux peindre une image faussée, cible de toutes les gausseries.

Mais que dire de ses lèvres, ourlées et charnues, qui appellent le baiser ? Sa bouche forme un joli arc de chair parfaitement dessiné qui se pose sur un délicat coussinet. Quand il me sourit, la lumière allume ses yeux et la chaleur inonde mon corps. Quand il me sourit, je crois que je pourrais défaillir sur le champ et si ce n’était l’étiquette, je me précipiterais à son cou pour fondre mes lèvres aux siennes. Le monde alors pourrait vaciller sur son axe, je n’en aurais cure. Ah, la fièvre me fait délirer. Je sais bien où je suis. Je n’ai qu’à rouvrir les yeux pour être à nouveau plongée dans les ténèbres et le froid de ces geôles souterraines où j’ai croupi un temps avec quelques compagnes d’infortune. Car, sans la présence de l’astre de ma vie, j’erre sans but au sein d’étranges parages privés de lumière et de chaleur.

Dans les étages du sinistre temple, ma Reine est toujours prisonnière. Et les enfants ! Les enfants !! Mais elle n’est plus ma rivale à présent. Ma rivale qui ne s’est jamais doutée de rien. L’histoire non plus ne retiendra pas mon nom. Trop insignifiante. La Reine ne l’a pas rendu heureux. Jamais. Elle était trop jeune. Trop avide de pouvoir. Trop éblouie par l’éclat de la Cour. Elle n‘était pas une femme pour lui en ces temps qui changent. Elle ne l’aimait pas. C’était ma maîtresse, j’appartenais à sa maison. Elle m’a donné, comme un paysan donne une tête de bétail, à la princesse italienne de son entourage, celle qu’elle appelait son « cher coeur ». Celle qui connut une fin horrible entre toutes. J’ai vu sa tête hideusement plantée au bout d’une pique et son corps affreusement mutilé traîné sur le pavé. J’ai pleuré ce jour-là car j’ai compris que le monde venait de basculer dans le chaos.

Je ferme les yeux pour ne voir que son visage. Son visage qui resplendit en mon souvenir. Je ferme les yeux car je ne veux pas oublier. Aucun détail. Aucun mot que nous avons échangé. Il était habile de ses doigts et mon corps s’en souvient bien mieux que les horlogers ou les serruriers avec leurs gestes mécaniques. Sentir son corps contre le mien, sa chaleur se propager dans mes veines jusqu’à en rougir de plaisir. Boire à ses lèvres et lire dans ses yeux une totale communion. Mon Amour, mon astre, mon souverain. Il était tout ça et bien plus encore.

J’entends leurs voix vociférer en cette matinée glaciale de janvier. Est-ce vraiment leurs voix qui me parviennent malgré la distance et l’épaisseur des murs? J’étais à son procès et c’était pitié de voir comment tout était joué d’avance. Il n’y avait rien à faire. Plus rien à attendre. J’entends leurs cris de haine, qui retentissent comme des rugissements de bêtes fauves. Ils veulent du sang pour y laver leurs mains. Ils veulent tuer mon Amour et moi que puis-je faire ? Sinon fermer les yeux. J’ai beau me boucher les oreilles, les hurlements résonnent sous mon crâne. Ils deviennent frénétiques. Mon Astre divin n’aura pas brillé bien longtemps au firmament. Son destin ressemble bien plus à cette comète qui a traversé le ciel alors que j’avais à peine 7 ans. Mon père me tira du lit dans la touffeur de juillet et me traînant dans le jardin, me montra le bolide céleste dont la chevelure enflammait la voûte céleste. Elle émerveilla tant ma jeune imagination qu’elle fit naître en moi la passion dévorante de ces objets flamboyants et inaccessibles. Et l’insecte osa regarder une étoile. Mais cette étoile, qui fit le bonheur de mes nuits devint une étoile filante, m’abandonnant au noir et au vide extérieurs. Je ne vois pas Dieu ici ? Ont-ils aussi eu raison à son endroit?

Ah, le silence ! Il est mille fois plus cruel que les cris et les rugissements de la foule hallucinée venue assister au spectacle. Aussi coupant qu’une lame d’acier. C’en est trop. Mon pauvre petit coeur a deviné avant ma raison. Mais je refuse de comprendre. Mes forces m’abandonnent et le néant miséricordieux s’ouvre devant moi. Je ne ressens plus rien, mon corps est glacé comme si toute chaleur l’avait fui. Laissez-moi avec mes fantômes et ma douleur. Laissez-moi...


En poussant un long soupir, elle se renverse, inanimée, contre le dossier d'un méchant fauteuil, troué et mangé par les mites. Son bras heurte l’accoudoir et sa main lâche alors un petit médaillon qu’elle tenait serré tout contre son coeur. Le médaillon roule sur le plancher disjoint de la petite chambre de service où elle se terre depuis des jours. Il roule, roule encore et, rebondissant contre le mur, termine sa course folle dans la poussière accumulée près de la plinthe de bois. Sur le médaillon, les traits d’un homme posant en majesté se devinent encore un peu. Cet homme esquisse un sourire énigmatique et solennel. Il n’aura jamais compris.

Attention, SPOILER (le portrait dans le médaillon)


M

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Onirian  Ecrire à Onirian

2013-11-04 12:05:28 

 WA-Exercice 124 - Un visageDétails
A peine en retard ! Et un texte en esquisse, ce qui est une idée plaisante pour un portrait ^^. J'imagine déjà Narwa me dire qu'il n'y en a pas assez. Et peut-être, une fois de plus, n'aura-t-elle pas tort.

--

Help


Ses yeux sont mi-clos et ne me regardent pas, ils fixent un point imaginaire, assez proche je crois, en bas, à sa gauche, et pourtant parfaitement inaccessible. La pièce est sombre, teintée de jaune et d’orangé, du coup ses pupilles semblent noires, en vérité, elles sont un peu plus claires que cela.
L’éclairage vient de côté, mais ses longs cheveux bruns forment comme un cocon protecteur autour de son visage, si bien qu’il n’y a qu’une petite bande de lumière qui éclaire véritablement ses traits. Son front est large, son nez droit. L’ombre sur ses paupières lui donnerait presque un air maquillée, je sais qu’il n’en est rien.
Ses lèvres entre-ouvertes sont assez charnues, des lèvres qu’il doit être bien agréable d’embrasser, mais cette bouche là, en cet instant là, n’appelle aucunement le baiser. Je distingue une rangée de petites dents, à peine.
Elle est belle. Terriblement. Et elle me fait invariablement penser à un air de piano, un Chopin mélancolique peut-être. Non Yiruma, c’est cette musique là qui l’habille le mieux. Du piano, dans tous les cas. Une de ses épaules est nue, avec ses cheveux qui cascadent dessus, ses mains sont grandes et fines. Elle est vêtue de noir, porte un collier rouge, un pull trop grand.
Tout ceci est sans importance, un résumé médical, une description de portrait-robot.
Ce qui compte, ce n’est en rien le jeu des ombres, la courbe de son menton pourtant à mi-chemin entre la perfection et un fruit défendu, ni même la façon dont l’arrête du nez accroche la lumière diffuse, ou encore son cou gracile qui se devine, dissimulé dans la pénombre, non... De l’extérieur de ses yeux perdus dans le vague d’un ailleurs dont j’ignore tout, tombe une ligne plus sombre. Une ligne dont je ne sais plus détacher mon regard, depuis que je l’ai remarquée.
Peut-être est-ce cela qu’elle observe, ce trait de tristesse coulant sur sa joue.
Elle m’a assuré, un jour, que ce n’était pas une larme, mais je suis tout simplement incapable d’y voir autre chose.
En réalité, de son visage, de son corps, tout regarde vers le bas. De ses yeux, qui fuient mon regard, du pli de ses lèvres, qui pointe vers les abysses, de sa tête aussi, légèrement penchée, comme sous le poids d’une réalité trop lourde. Même ses épaules frêles semblent voutées.
Il n’y a pas de cri dans cette photo, pas de douleur qui hurle, qui s’exprime, non... C’est une solitude, une mélancolie profonde, une de ces fêlures qui peut briser les montagnes et rendre fou les hommes. Tu appelles à l’aide.
Souvent, j’ai souhaité être là, pour pouvoir lui raconter mes rêves, et l’emmener avec moi. Passer mon doigt sur sa joue et gommer cette larme qui n’en est pas une, la recueillir, la boire. Et pour me regarder moi, elle aurait du relever la tête, relever les yeux, et tout son corps aussi.
J’ai rêvé mille fois de poser ma main sur cette épaule nue et combien de fois également, j’ai vu mes doigts qui écarter ses cheveux pour sortir son visage de l’ombre, et senti ce contact fugace ? Et que ne donnerais-je pas pour voir un sourire s’épanouir enfin sur ce visage ? J’aimerai lui dire que je l’aime, qu’elle est ma vie, mon âme et ma folie tout à la fois. J’aimerai murmurer un millier de voyage à son oreille, et lui parler de la magie qui est comme la sève du monde, et puis je lui chanterai des trucs idiots aussi, mais qui la feront rire. Et puis...
J’aimerai... J’aimerai tenir ses poignets trop fins dans mes mains trop grandes, et faire glisser les siennes contre mes paumes, et serrer, pour ne pas laisser fuir ses doigts. Et souvent je me dis qu’elle ressemble à un automne, avec ses couleurs de feu, avec sa pluie qui frappe contre les vitres, avec le vent dans ses cheveux si long, et sa fin annoncée.
Je la regarde et toujours de nouveaux détails apparaissent, l’arrondi de ses narines, à peine distinguées, le sombre presque noir juste au dessous de la courbe du menton, et le jeu de la lumière sur ses yeux mi-clos, qui persistent à ne me regarder jamais.

Au sillon de peine qui souligne son visage, un autre fait écho, sur le mien, parce que cette photo, c’est tout ce que j’ai jamais eu et tout ce que j’aurai jamais d’elle. Ça, et quelques mots, envolés depuis longtemps.
Le résumé d’une vie qui n’existera jamais.

Je me hais. Je t’aime.

--
Onirian, qui écrit un matin d'automne.

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2013-11-05 14:21:31 

 WA, exercice n°124, participationDétails
J'aurais adoré lire ce texte s'il avait été écrit par Maedhros. Mais il se trouve que c'est à moi que l'idée est échue. Alors, j'ai fait de mon mieux.




Stabat mulier




Comme Marie, elle lève les yeux sur la Croix. Et dès que je la vois, je suis frappé, happé, transpercé. Ce regard au vert si pâle, embrouillardé de larmes retenues, porté par deux grands yeux qui s’effilent félinement vers les tempes. Ce regard est tendu comme un fil prêt à rompre. Je ne dirais pas qu’il espère encore mais il est infiniment dans l’instant présent, suspendu à un souffle... Suspendu ? Non. Il Le porte, il Le soutient, il Lui donne avec une ténacité confinant à la folie autant de vie qu’un regard peut en contenir. Il y a quelque chose de surhumain dans ce regard. Il est le Fils de Dieu, promis de toute évidence à la Vie Eternelle, et elle ne peut l’ignorer. Et pourtant on dirait qu’elle s’acharne à maintenir en vie, par le simple feu de ses prunelles, la pauvre dépouille charnelle qui agonise sur un morceau de bois. La comparaison avec Marie est saisissante. La Mère sait. Son visage est presque serein, elle regarde loin, plus loin, vers le Ciel. La Vierge regarde Dieu. Madeleine regarde l’Homme.
Le peintre a-t-il blasphémé ? La tête de Marie est ceinte d’une auréole de lumière, mais c’est Madeleine qui est au premier plan, même si elle se tient un pas en arrière. Je n’entends plus rien autour de moi. Je suis fasciné, hébété, emporté par ce visage, que je scrute minutieusement avec adoration. Les sourcils sont droits, à peine crispés sous l’effort de la volonté. Le front est haut, parfaitement lisse, barré en son milieu par une mèche fine échappée de la luxuriante chevelure défaite et embroussaillée qui ondule en un fleuve sauvage et sensuel. Les cheveux recouvrent l’épaule droite et s’éparpillent sur le dos jusqu’à la taille, leur blonde rousseur a la vivacité de l’écureuil, la fulgurance cachée du renard... Ce n’est pas une couleur, c’est de la vie en mouvement.
Sa beauté me bouleverse. Je m’étonne de la trouver étrangement familière. Je me leurre, je ne la connais pas, je voudrais seulement la connaître... Je m’accroche à ce visage comme un naufragé à un tronc d’arbre. Le nez est délicat mais droit, il ne manque pas de force dans sa gracieuse courbe. La bouche est charnue, entrouverte sur une douleur muette. La souffrance est là, entre les lèvres chaudes et humides, faites pour le plaisir, s’exhalant en un souffle haletant qui lutte contre le désespoir.
La pommette est marquée, mais sans agressivité aucune. La joue est presque creuse, le menton pointu, mais l’ovale du visage ne dégage que de la douceur. Elle est jeune, si jeune ! Si femme, si naturellement belle, sans aucun fard, sans aucun artifice, surprise par un peintre indiscret dans l’intimité de son immense peine...



J’adore les femmes, cela n’est pas un secret. Surtout les plus belles, les reines du bal, les poitrines arrogantes et les fesses orgueilleuses. J’ai l’âme d’un chasseur. Il me les faut toutes ! Combien de fois je me suis détourné de ma route pour suivre une inconnue au mépris de toute raison... Je suis hypnotisé par ce visage, mais je ne ressens aucun émoi. Mon corps est silencieux, inerte, passif. Comme si ce personnage était tellement sacré que même le fantasme ne pourrait l’atteindre. Mais c’est une femme ! Une femme dont la robe rouge est presque entièrement cachée sous le manteau noir, une femme à la poitrine généreuse pudiquement masquée, qui croise ses longues mains pâles sur son ventre gonflé, comme pour protéger... Protéger ?
Je cligne des yeux, je porte la main à mon front. C’est elle qui... Je... je communique avec une peinture sur le mur d’une chapelle ?
« Bon, Mario, tu as fini ? Je m’emmerde, moi ! »
Comme si j’avais reçu un jet d’eau froide en pleine tête, je dévisage la créature qui m’interpelle. Elle est trop blonde, trop maquillée. Ses talons sont trop hauts, sa mini-jupe qui brade des jambes pourtant parfaites est simplement vulgaire en ce lieu consacré. Elle me donne la nausée. Les dents serrées, le regard dur, je fulmine à voix basse :
« Casse-toi. Dégage. Disparais !
- Mais enfin, Chouchou... »
Mes yeux sont sans doute suffisamment éloquents. Son déhanchement inutile se dirige vers la sortie. Je me sens libéré d’une présence importune. Méticuleusement, je sors mon appareil de son sac. Je ne mitraille pas, non, j’ajuste. Je recopie avec amour vues d’ensemble et gros plans. Je multiplie les angles, les zooms, les cadrages. Je m’applique comme si ma vie en dépendait, avec l’impression saugrenue que ma vie en dépend.


Une fois de plus, je regrette l’absence de Gabrielle. Elle aurait su se taire, elle aurait perçu mon trouble, elle aurait seulement serré ma main. Mais je ne peux pas la blâmer de s’être lassée de mes écarts incessants. Elle ne m’a que trop pardonné, pendant les quatre ans de notre vie commune. Je n’ai pas protesté contre la sentence. J’ai pensé que les relations durables étaient trop contraignantes. J’ai cru que je m’en remettrais vite. Et pourtant, deux ans après, elle me manque toujours.



« La chapelle Santa Croce a été entièrement rénovée en 1988. Un peintre turinois, Mario Casile, connu pour ses talents d’aquarelliste et auteur d’une mémorable exposition sur Venise, a accepté de repeindre l’intérieur des murs, avec en particulier cette scène de la Crucifixion que vous avez devant vous. Comme il était d’usage à la Renaissance, il a donné aux saints personnages les visages de ses proches. Ainsi, les angelots dans le coin en haut et à droite ressemblent à ses petits-enfants. Marie est largement inspirée de son épouse, le Christ a les traits de son fils et Saint Jean ceux de son frère...
- Et Marie Madeleine ? »
Le guide me regarde de travers.
« La femme en rouge, au premier plan, près de la Vierge, c’est bien Marie Madeleine ? »
Mon italien est un peu hésitant, je n’ai pas pratiqué depuis plus de vingt ans, mais je suis sûr d’être compréhensible.
« Eh bien... En fait... Je regrette...Sur les notes qu’il nous a laissées, monsieur Casile n’a jamais fait mention de Marie Madeleine. Il l’a sans doute inventée... »
Je ne vais pas me contenter de cette réponse. Quand tous les autres touristes sont partis, je m’acharne sur le vieil homme jusqu’à ce que, confus et en nage, il me griffonne enfin l’adresse du peintre. C’est à Rivoli, dans la banlieue de Turin. Je peux y être en début d’après-midi. Cela dépasse le cadre de mon photo-reportage sur « Les trésors cachés du Piémont », mais cette fois c’est pour moi que je roule. Et je n’envisage même pas de ne pas y aller.



Une femme m’ouvre la porte de cette petite maison, située dans un quartier modeste et entourée d’un jardinet où s’étiolent trois roses et deux bégonias. Elle est très âgée, sûrement plus de quatre-vingts ans. Néanmoins elle se tient parfaitement droite et impose le respect. Ses cheveux blancs sont retenus par un chignon soigné ; elle est maquillée de manière discrète mais efficace. Ses yeux de ciel clair sont mis en valeur par le chemisier du même ton, que recouvre un tailleur bleu marine très stylé. Un camée suranné orne le revers de la veste, un collier de perles fines ceint son cou ridé mais fier, et des bracelets d’or s’entrechoquent à son poignet. Il se dégage d’elle une distinction authentique. Dans un tel décor, je m’attendais plutôt à une grand-mère voûtée et vêtue de noir, ou bien à une vieille dépressive en robe de chambre... ou encore à une fausse jeune en jogging et baskets. Je suis impressionné et surpris, mais elle semble l’être encore davantage. Une émotion violente parcourt son visage naturellement équilibré, elle recule d’un pas. Peut-être craint-elle une agression ?
« Mon mari n’est pas là », répond-elle à ma requête. « Je vous en prie, entrez, il va revenir bientôt. Apprécieriez-vous un café ? »
Elle dispose les tasses sur la table basse du salon. L’intérieur est cossu, sans ostentation, sans surcharge. Les murs sont couverts d’aquarelles, certaines représentant Venise, d’autres la campagne piémontaise. Je la surprends à me regarder par en dessous tout en essayant de cacher son trouble.
« Vous êtes gaucher ? » demande-t-elle en désignant du regard la montre que je porte au poignet droit.
- « Non, non... Mais j’ai un grain de beauté là, sur l’intérieur du poignet, à gauche. Le médecin m’a dit qu’il valait mieux éviter les frottements.
- C’est juste, c’est juste. »
Elle a l’air satisfaite de ma réponse et me sourit vaguement en remuant son café.
« Madeleine... », reprend-elle, « non je ne sais pas de qui Mario a pris les traits. Mais cette peinture est magnifique, n’est-ce pas ? Et tellement intime... »
Cette femme est d’une grande finesse. Comme Gabrielle. J’ai le sentiment cependant qu’elle me promène pour ne pas me dire ce qui m’intéresse vraiment. Elle me questionne sur mon métier, s’extasie sur l’art difficile de la photographie, déplore que son mari ne puisse plus peindre car sa vue a beaucoup baissé, surtout l’oeil droit...
« Justement notre fille aînée l’a emmené chez l’ophtalmologiste. Il devait déjà être rentré, mais peut-être y a-t-il eu de l’attente... Vous voulez voir son atelier ? »
Je visite l’ancien garage dont un pan de mur entier a été remplacé par une grande baie vitrée, par où le soleil doit s’engouffrer tous les matins. Je ne sais pas pourquoi, mais où que je sois, je sais toujours où est l’est. Pas le nord, non, je m’en fiche. Mais l’est. Là où le soleil se lève. Angelina, ma mère adoptive, m’a dit que c’était parce que j’étais né au lever du jour. Tout à coup, elle aussi elle me manque. Je n’avais pas pensé à elle depuis bien longtemps. Je n’ai que peu de souvenirs de son mari, Vittorio, il est mort quand j’avais cinq ans. Je me souviens surtout des photos, il y en avait partout dans l’appartement. Elle me répétait qu’il était bon, qu’il m’aimait beaucoup... Et que surtout je ne devais pas en vouloir à ma mère, qu’elle m’avait confié à eux parce qu’elle ne pouvait pas faire autrement, parce qu’elle était veuve, parce qu’elle était seule. Sur mon acte de naissance, j’étais né à Turin, d’Angelina Rossi et Vittorio di Mantegna, mais elle avait toujours insisté pour que je sache que ce n’était pas vrai. Elle était comme ça. Douce, gentille, et profondément honnête.
Mon hôtesse me rappelle au moment présent.
« La lumière est belle, ici. Mais il n’en profite plus beaucoup... »
Sur le bureau, où s’entassent dans un désordre inouï (« Pardonnez, mais vous savez, c’est un artiste, il refuse que je range... » des catalogues, des lettres non décachetées et des esquisses inachevées, je remarque la photo encadrée d’un jeune homme en uniforme.
Et là, le téléphone sonne. Je ne sais pas ce que serait devenue ma vie sans cette sonnerie. Mais le destin a décidé de donner des réponses aux questions que je n’ai jamais osé poser.
« Excusez-moi. »
Je soulève le cadre, j’examine de près le portrait de cet homme. Il y a des avions à l’arrière-plan. Et là, moi aussi, je sursaute, je recule, je manque de lâcher l’objet tellement la surprise est forte. C’est moi ! Non, ce n’est pas moi, mais c’est mon sosie parfait. Le même visage, les mêmes cheveux noirs, le même menton carré... Ah si, il y a une différence. Ses yeux sont foncés, les miens sont verts.
Elle revient, soucieuse.
« Je suis désolée, il va falloir que je sorte. Ma soeur vient d’avoir un malaise.
- Je suis confus... Vous avez un militaire dans votre famille ? »
Ma question la cueille à froid, elle répond sans réfléchir, avant de se mordre les lèvres comme si elle avait révélé un secret capital.
« C’était notre fils, Fabio. Il... il est mort il y a longtemps. Un accident d’avion. Je... Vraiment, toutes mes excuses. Je vous raccompagne. Mais... je vous en prie... Revenez quand vous voulez. Mon mari... serait tellement heureux de vous rencontrer... »




J’ai loué une chambre d’hôtel à Turin. La nuit n’est pas encore tombée, je pourrais rentrer, je devrais. Il y a sûrement encore des avions... Sans réfléchir, je compose le numéro de Gabrielle. Je n’ai pas besoin de consulter mon répertoire. Celui-là, c’est étrange, il n’est jamais sorti de ma mémoire.
« Bonjour, vous êtes en communication avec le répondeur de Gabrielle. S’il vous plaît, vous seriez bien aimable de me laisser un message. Je ne manquerai pas de vous rappeler. Merci, à bientôt. »
Je raccroche, terrifié. Que pourrais-je lui dire, qui ne lui arrache un haussement d’épaules et une moue de dépit ? Gabrielle... Toujours à dire merci, s’il vous plaît, je vous en prie... Gabrielle, mon paradis perdu. Je ne vais pas pleurer sur mon sort. Je l’ai mérité.
Tant de choses se bousculent dans ma tête. Pourquoi cet homme, cet aviateur, me ressemble-t-il tant ? Je ne crois pas à la coïncidence. La femme du peintre a manifesté trop d’émotion à mon égard. Pourquoi ne m’en a-t-elle pas dit davantage ? Et pourquoi, bougre d’idiot, ne lui ai-je rien demandé ?
Google est mon ami. Casile, aviateur, accident.
Fabio Casile, né le 22 novembre 1952 à Turin, Italie. Pilote d’essai de l’Aeronautica militare. Grade : capitaine. Décédé le 24 novembre 1985. Son avion a explosé en vol, au cours d’une manifestation aérienne, sous les yeux de ses parents, Mario et Mirella, et de sa femme, Maddalena, qui portait son enfant.
Je suis né en 86. En février. Si c’est moi, elle était enceinte de six mois. C’est possible.
Il a repeint la chapelle en 88. Trois ans après, les souvenirs étaient encore nets dans son esprit. Un peintre a la mémoire des visages. Il a honoré son fils mort en le représentant à la place du Christ. Même pour un croyant, il n’y a pas de faute. Et puis, est-ce à cause du prénom ? Mais non ! Il n’a rien inventé de l’expression de Madeleine. Dans la chapelle, elle regarde la Croix, mais il a peint le visage de sa belle-fille levant les yeux vers son mari mourant en plein ciel. Est-ce que c’est choquant, de recopier ainsi un moment intime pour l’exposer aux yeux de tous ? Si c’est bien elle, si c’est bien moi, pourquoi a-t-elle disparu ? Pourquoi m’a-t-elle abandonné, alors qu’elle avait une belle-famille ? Est-ce qu’ils se sont disputés ? Non, dans ce cas il ne l’aurait pas peinte. Il l’a immortalisée parce que justement il ne lui reprochait rien. Mais alors pourquoi, pourquoi est-elle partie ?
Je me monte la tête. Fabio me ressemble, d’accord, mais il y a sûrement eu cette année-là d’autres veuves qui ont abandonné leur enfant.
Il faut que je visionne mes photos. J’ai un article à rédiger. Je rentre demain. Les impressions, sentiments, coïncidences... foutaises ! J’ai un bon métier, je suis libre, je gagne bien ma vie et je fais ce que je veux. J’ai vu une jolie chapelle et j’ai rencontré une vieille folle qui m’a pris pour quelqu’un d’autre. Et j’ai bien failli, moi aussi, me prendre pour quelqu’un d’autre. Demain je serai rentré et j’appellerai Sophie, ou Anita... ou Laurence...
C’est quoi cette tache ? Il y a une petite marque sur le poignet gauche de Marie Madeleine. La main gauche soutient la droite, et la face interne du poignet est exposée. Il y a une tache... comme un grain de beauté. Je regarde mon poignet. C’est une coïncidence. Mais l’appel est plus fort que tout. Il faut que j’y aille, maintenant, tout de suite. La chapelle sera fermée pour la nuit, c’est idiot, mais je dois y aller.



Je roule. Je me gare. Une faible lueur filtre à travers les vitraux, sans doute à cause des cierges. J’ai le coeur qui bat. La lourde porte se laisse ouvrir. Quelqu’un est agenouillé au premier rang. Une femme. Un châle noir recouvre sa tête et ses épaules. Je marche vite, trop vite. Elle se retourne.
« Mario ! Je t’attendais. »
Je deviens fou. Elle est là, devant moi, Madeleine. Celle de la peinture, la même, exactement. Toujours aussi jeune et toujours aussi belle.
« Viens t’asseoir près de moi, mon enfant. J’ai désiré cet instant depuis si longtemps... Comme tu ressembles à ton père ! »
Sa main, blanche colombe nue qu’aucune bague n’alourdit, frôle ma joue.
« Mais tu as toujours mes yeux... »
La gorge nouée, je lui montre mon poignet.
« Oh, ce grain de beauté... Tu ne l’avais pas quand j’ai dû... Il a poussé plus tard...
- Pourquoi es-tu partie ?
- Oh, mon enfant, si j’avais pu ! Tu avais à peine plus d’un an quand mon lait s’est tari tout à coup. Le lendemain, tu es tombé malade, et aucun remède ne faisait céder la fièvre. Même à l’hôpital, les médecins ne savaient pas pourquoi. Dans la nuit, Gabriel m’est apparu. Le Père ne me laissait pas le choix.
- Le père ? Mario ? »
Elle secoue sa longue chevelure rousse.
« Non ! Mario et Mirella ont toujours été de véritables parents pour moi. Ils m’ont crue, ils ne m’ont jamais jugée, ils m’ont ouvert les bras et m’ont tant aidée après ta naissance... Je t’ai nommé comme ton grand-père parce que c’était le souhait de Fabio. Il adorait son père. Et moi-même je n’ai jamais rencontré un homme si bon, si doux, si généreux...
- Mais alors...
- Le Père. Il ne m’a jamais pardonné d’avoir aimé l’Homme.
- L’Homme ? Jésus ? Mais tu veux dire...
- Oui. Marie Madeleine, c’est moi. Mario avait deux bonnes raisons de me peindre sur ce mur : j’étais la femme de son fils... et j’étais...moi... Le Père m’a condamnée à errer sur la terre, pour que je ne puisse jamais retrouver son Fils... »
La flamme des cierges vacille, comme ma raison.
« Je sais, c’est impossible à croire. Mais Mario et Mirella l’ont fait. Fabio... était le seul homme que j’aie aimé après Jésus. Tant de siècles de solitude... de silence...Toujours partir, avant que les gens que j’aurais pu aimer ne réalisent que je ne vieillissais pas... J’ai vu mourir mes filles, mes jumelles adorées, Ses filles... Je les ai accompagnées, sans avoir plus personne à prier, jusqu’au bout de leurs souffrances. Y a-t-il plus grande peine que de voir mourir ses enfants, mêmes quand ils sont adultes, même quand ils sont vieux ? Pour me donner du courage, je me disais que je leur épargnais le chagrin de mon absence, que jamais je ne leur aurais manqué... J’ai fermé leurs yeux, je les ai bercées contre moi dans leur mort, l’une après l’autre, comme je les berçais quand elles étaient à mon sein... Perdre l’homme qu’on aime est une douleur atroce. Mais perdre un enfant ! J’ai fui pendant des siècles pour ne plus jamais aimer, pour ne plus jamais engendrer, pour ne plus jamais souffrir de cette sorte !
Et puis j’ai rencontré Fabio, et ses parents. Ils étaient si simples, si limpides, si innocents... J’ai cru que la vindicte du Père s’était lassée. Jusqu’à ce jour où, enceinte de toi, j’ai revécu la même douleur qu’au pied de la Croix... Je t’ai abandonné, c’est vrai, mais c’était pour te sauver la vie. Mario et Mirella l’ont compris. Ils ont gardé le secret. Angelina et Vittorio aussi. Le Père ne peut rien contre la bonté des hommes. Et tu as vécu. »
Elle se penche vers moi, me serre dans ses bras. Je sens de longues larmes brûlantes ruisseler sur mes joues. Je sais que c’est elle, mon corps le sait. C’est son odeur, c’est sa chaleur, c’est la caresse légère de ses longs cheveux. J’ai retrouvé ma place. Je sais qui je suis.


« Gabrielle... Je serai là demain. Il est peut-être trop tard, mais... Tu avais raison, je me suis comporté comme un idiot et un égoïste. J’ai changé, Gabrielle. J’ai appris. Je t’aime. C’est toi que je veux. Et je veux un enfant de toi. S’il te plaît. »
Narwa Roquen, dépassée par son sujet

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2013-11-05 23:25:35 

 Commentaire Maedhros, exercice n°124Détails
C’est une belle histoire, simple et touchante, qui respecte bien la consigne. Bonne idée d’avoir choisi le portrait d’un personnage célèbre, et je suis sûre que la plupart des lecteurs ( en tout cas ceux qui n’ont pas séché tous leurs cours d’Histoire) l’auront reconnu bien avant la fin. En revanche l’identité de la narratrice est plus mystérieuse, et là est tout le charme de ce texte, c’est de réussir à nous dévoiler progressivement qui elle est, d’une manière aussi subtile qu’efficace. Techniquement, ce n’est pas aussi facile que ça en a l’air ! Quand on essaie d’en faire autant, on réalise vite toute la maîtrise que cela nécessite, sans faire appel à un personnage extérieur ou à une révélation brutale.
Le texte est court, mais il est bien construit, plausible et cohérent.


Bricoles :
- Sans la présence de l’astre de ma vie coeur, j’erre... : ?
- Mon corps s’en souvient bien mieux que les horlogers ou les serruriers avec leurs gestes mécaniques : je crois que tu as télescopé deux concepts en un, et cela nuit à la compréhension
- Je ne vois pas Dieu ici ? : pourquoi « ? » et pas « . » ?


Merci pour ce bon moment, intelligent et cultivé. Que la jeunesse en prenne de la graine !
Narwa Roquen, ah ça ira ça ira ça ira...

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-11-11 17:02:51 

 ShokuzaiDétails
C'est le portrait d’un être cher qui s’est confondu avec les ombres l’entourant déjà, comme une atmosphère délétère. C’est un portrait en noir et blanc où le noir finit par l’emporter. Un portrait tout en clair obscur, noyé d’ombre, une sorte d’invocation pour tenter de réécrire l’histoire, mais hélas, vouée à l’échec. Un drame intime rôde entre ces lignes, certains détails y font allusion, comme le choix des mots également : la fuite, la fin, l'automne...

Le paragraphe qui commence par « En réalité... » est vraiment excellent. Chaque mot rappelle cette fatale attraction qui l’attire vers le bas, toujours plus bas. La force de l’amour ne peut rien pour freiner cette inexorable descente aux enfers. Il y a un désespoir poignant dans la façon dont tu décris cette tragique histoire.

Alors oui, certaines expressions sont perfectibles, et j’ai noté une ou deux bricoles par-ci par-là. Mais, à mon avis, rien qui n’altère vraiment la qualité de ce texte.

La consigne est bien respectée. Au fait, Yiruma, c’est « The river flows in you » ?

Well done !

M

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2013-11-11 23:21:14 

 Commentaire Onirian, exercice n° 124Détails
Une histoire délicate et triste, toute en clair-obscur. Le portrait est bien dessiné, l’émotion est palpable, le lecteur est accroché. Il s’en dégage une sensualité pudique, à peine évoquée, et la finesse qui te caractérise joue une belle partition sur un mode mineur – et ce n’est jamais le plus facile.


Bricoles :
- Ses lèvres entre-ouvertes : entrouvertes
- Entre la perfection et un fruit défendu : pourquoi pas « le » fruit défendu ?
- L’arrête du nez : arête
- Voutées : voûtées
- J’ai vu mes doigts qui écarter : un « qui » de trop
- J’aimerai lui dire... j’aimerai murmurer... je lui chanterai... j’aimerai... j’aimerai sentir... : c’est du conditionnel : j’aimerais... je chanterais...
- Un millier de voyage : voyages
- Dans ses cheveux si long : longs


Le titre est un peu... facile. Et puis, comme tu t’en doutes, je trouve dommage que tu te sois limité à une esquisse, certes réussie, alors que tu es tout à fait capable de peindre une grande fresque impressionnante et admirable. Allez, une belle histoire, intelligente et bien construite, pour mettre en valeur ce portrait énigmatique... De quoi vraiment faire pleurer les foules, toucher le coeur des lecteurs et mériter nos applaudissements... Tu comprends bien que connaissant ton talent, je râle que tu ne nous le donnes pas !
Narwa Roquen, un poète génois a écrit " celui qui se contente meurt, et ne le sait pas" "

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Maedhros  Ecrire à Maedhros

2013-11-16 17:24:59 

 Celle qui se tient debout.Détails
Bien sûr, cette histoire intègre plusieurs éléments qui fréquentent mes thèmes favoris : la religion, la photographie, l’architecture, l’Italie (ah ! l’Italie...) cette union du merveilleux (au sens de Voragine) et de l’humain, la façon dont les personnages avancent vers leur destin, en une quête qui se dévoile peu à peu.

D’abord le titre en latin. Un péché mignon. Tu as habilement remplacé la mère par la femme et cela jette un jour nouveau sur la scène du tableau. Bien joué.

Le thème de ton histoire est redoutable. Un amour caché durant des siècles, banni par les efforts conjugués des hommes et de l’Eglise romaine. Cet amour, variation subtile et originale du fil conducteur du roman de Dan Brown, aurait unit au plus près le Fils de Dieu et la Fille de l’Homme, cette mystérieuse et séduisante Marie-Madeleine, pourchassée ici par une malédiction divine qui la sépare du monde des hommes.

Marie-Madeleine, celle qui embrasse Jésus sur la Bouche, celle qui est présente sur de nombreux tableaux représentant le Calvaire, comme sur le retable retable d'Issenheim (confer Saint-Antoine sous les tilleuls), est l’une des figures les plus complexes du panthéon chrétien. Son image fut brouillée par les zélateurs qui voulaient affirmer la nouvelle foi jusqu’à ce qu’on ne sache plus trop bien qui pouvait être celle qui se cachait (ou était emprisonnée) sous tant de maquillages : la première disciple de Jésus, la soeur du ressuscité, la pute au coeur infini...

Mais l’histoire que tu nous livres pousse doucement la porte d'un secret lourd de menaces. Un photographe hypnotisé par un tableau, fourvoyé dans son histoire personnelle, soudain s’arrête sur un détail pictural qui va le conduire à mettre au jour un secret millénaire. Au bout d'un ténu fil d'Ariane, trouvant la mère, il trouvera la femme et la boussole de sa vie. Tu vois, je ne dévoile rien de cette intrigue qu’aurait apprécié de dénouer Robert Langdon, lui-même.

Il y a des expressions que j’aurais bien voulu avoir, notamment :
- La Vierge regarde Dieu. Madeleine regarde l’Homme.
- ...porté par deux grands yeux qui s’effilent félinement.
- Ce n’est pas une couleur, c’est de la vie en mouvement.

La façon de dépeindre le portrait est à la fois très visuelle, expressive et sensuelle. J’ai ressenti cette magie particulière qui se dégage de ses fresques bibliques où les artistes rivalisaient de techniques, de couleurs et même de codes pour y introduire des trésors sur lesquels peinent encore des dizaines de chercheurs.

Il y avait une émission sur ARTE ou la 5, je crois, il y a quelques années, qui décortiquait des tableaux célèbres de cette façon. C’était à la fois intelligent, instructif et passionnant, dans le sens où le narrateur nous faisait pénétrer les dimensions cachées de la composition,de la perspective et de la symbolique.

Tu dis que tu as été dépassée par ton histoire. Je connais ça. Mais j’ai l’impression que la fin est peut-être amenée un poil trop rapidement.

Mais cela n’enlève rien à cette très belle histoire qui enjambe le temps et qui dépeint l’une des plus belles love story (potentiellement) mais au destin tragique puisque les deux amants ne pourront jamais se retrouver, même au Paradis.

M

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Onirian  Ecrire à Onirian

2013-11-18 11:43:12 

 Kiss the rainDétails
C'est par "River flows in you" que j'ai découvert Yiruma, et je ne peux pas l'évoquer sans penser à ce morceau que j'ai du écouter un bon million de fois (La wa 13 a été écrite sur "River flows in you" par exemple, et peut-être aussi la 14 qui est la suite)

Mais histoire d'être exhaustif, c'est plutôt "Kiss the Rain" que je désigne ici (et histoire de tout dire, cette fois, j'avais tout Yiruma en aléatoire dans les oreilles quand j'ai écrit).

--
Onirian, qui aime bien le piano, parfois.

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