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 WA exercice 109 participation Antarès Voir la page du message Afficher le message parent
De : Antarès  Ecrire à Antarès
Date : Vendredi 22 juin 2012 à 13:28:53
Murmures


Attentif et immobile, Alastor écoutait les jérémiades du vent nocturne. Perdu au milieu des oripeaux des anciens guerriers, l'enfant de 10 ans sentait une jubilation mêlée de mort et de volupté s'emparer de lui. Ombre parmi les ombres, son corps tel un souffle se confondait à celui de la nuit. Un bruit de pas, soudain, se fit entendre : les squelettes reprenaient vie. L'un d'eux, marchant d'un pas décidé s'avança vers lui puis posa sa main décharnée sur son épaule.
Tout secoué, Alastor se réveilla. Une silhouette courbée se tenait devant lui dans la lumière du jour naissant.
"Réveille-toi, voilà l'aube, l'occasion pour toi de faire montre de ta maîtrise de l'Art!"
Dans un grognement, le jeune garçon daigna se lever et alla rejoindre le baquet d'argent pour y immerger son visage et émerger ainsi de sa torpeur. Son reflet moiré apparaissait dans l'eau. Il contemplait pendant quelques instants son visage blême qui lui souriait ainsi que celui du vieil homme qui s'approchait. Vêtu d'un manteau de nuit, il tenait dans sa main droite une longue pipe sertie de cristaux couleur améthyste et saphir. A son coup pendait un globe de terre argentée, auréolé d'une lueur astrale, sur lequel se reflétait son visage sculpté par la sagesse du temps. Ses yeux céruléens occultaient mal une certaine angoisse et ce en dépit de l'air impassible qu'il arborait habituellement, caché derrière sa barbe de bicentenaire.
Après avoir récupéré ses esprits, Alastor sentit une étrange sensation parcourir son épaule : un frisson permanent tiraillait sa peau. Il ne s’en inquiéta guère : il était bien décidé à dévoiler au grand mage l'étendue de son savoir. Il se munit de son matériel d'alchimie antique et passa la porte de la chambre. Malgré la clarté diurne qui illuminait la précédente pièce, une lueur vespérale accompagnée d'un froid mystérieux se répandait dans le couloir orné de peintures préraphaélites. Les murs cylindriques semblaient communiquer entre eux, ou peut-être était-ce avec lui qu'ils communiquaient : une voix térébrante sifflait à ses oreilles au point de l'abasourdir et de le déséquilibrer. Son corps inerte gisait sur le sol comme pétrifié. Le test allait commencer : sous ses yeux sans expression défilaient d'étranges silhouettes ; des visages masqués d’ombres chevelues ne laissaient paraître aucune émotion mais leurs voix résonnaient dans son esprit. Dans un éclat pourpre, l’une d'elles s’adressa à lui :
"Alastor, après délibération du Très Vénérable Conseil Des Cinq nous avons convenu, compte tenu de tes origines étrangères, que ton épreuve pour que nous te conférions le don de possession consisterait à en faire bon usage dans des conditions réelles."

Après qu'eut fini cette première voix, des flammes jaillirent et une deuxième poursuivit :

" -Pour ce faire, tu devras vivre les vies improbables de créatures mâles et femelles du monde inférieur : la première s’appelle Ludivine et la seconde Tom." Après un moment d'observation, elle reprit d'un ton lugubre et menaçant :
" -Mais si tu ne reviens pas indemne de cette épreuve, tu seras condamné à errer dans les méandres abyssales de leurs esprits, tourmenté par les affres de la vie terrienne, emprisonné dans le cachot infernal de leur crâne, partageant leur souffle, ressentant comme tienne leur chair se tordant sous les assauts implacables de toute enveloppe corporelle.

-Inutile d'en faire trop Grand Maître ! -Yue, le maître des maîtres, venait de prendre la parole.- J'ai foi en lui : je l'ai aperçu pour la première fois qui luttait contre la rivière défunte. Je l'ai recueilli et ai fait de lui mon élève. Souhaitons-lui simplement bonne chance!"

Suite à cette intervention, un grand vent se leva et à mesure qu'il chantait de son souffle rauque, les visages s'estompèrent dans un épais brouillard.

Au moment où Alastor rouvrit les yeux, il sentit la douceur soyeuse des cheveux d'une jeune fille lui caresser le visage. Dans sa main, un oeil doré, symbole de clairvoyance le dévisageait d'un air sévère car au travers de celui-ci, le conseil dans son intégralité l'observait.

" -La première épreuve ! pensa-t-il en contemplant son corps de jeune fille. Ainsi me voilà dans la peau de, de, mais de qui au fait?
-Ludivine, Ludivine ! - Sa main imitait des mouvements de lèvres.- Profite de ce moment d'observation : la possession ne peut qu’être temporaire, tu ne peux te permettre de dépasser un temps supérieur à 4 heures par jour. Un mal étrange affecte l'existence de cette jeune fille. Fais en sorte de résoudre le problème. Tu as accès à sa mémoire et à ses pensées. N’oublie pas de recueillir le plus d'informations possible avant d'agir."

Telle fut la mission du conseil.

*****************************************************

Alastor promena son regard : l'environnement qui l'entourait était incongru. Il s'agissait d'une chambre de petite fille dans laquelle se trouvaient, un lit de petite fille, un miroir de petite fille et des jouets de petite fille, comme des poupées qui semblaient ne pas avoir servi depuis fort longtemps. Sur le lit trônait tel un monarque un gigantesque ours en peluche rose sur lequel était inscrit comme une devise : "Je suis ton meilleur ami". En dépit de l'ambiance rose pastelle du décor, un silence anormal et pesant assombrissait ce cliché. Conformément aux instructions reçues, Alastor était à l'affût du moindre détail et du moindre signe susceptibles de l'aider : ses yeux se posèrent alors sur un vieux livre. L’ouvrage était décrépi et bien que d'apparence ordinaire, il l’intrigait. Ne sachant quoi y trouver , il l'ouvrit pour en connaître le contenu...

Au dos de la première page figurait un étrange dessin : une enfant allongée sur une minuscule barque, bercée par le faible courant de la rivière cristalline. Ce genre de représentation qui habituellement inspire harmonie et repos n’avait rien d’idyllique ; son calme solennelle suscitait le malaise. La voûte céleste donnait au corps allongé un hâle blafard. Pendant quelques instants, Alastor crut que le dessin s'animait de lui même, mais dans un moment de lucidité, il comprit qu'il s'agissait de souvenirs enfouis qui rejaillissaient. Une scène atroce, entrecoupée de cris stridents et de gémissements étouffés se déroulait dans son crâne : l'enfant de la barque jouait dans une verdoyante vallée, sa ressemblance avec Ludivine était saisissante, puis, alors que s’assombrissait le ciel, des créatures surgirent d’une rivière bleue pâle. Celles-ci d'apparence humaine n'avaient pas de regard : un néant luisait au travers de leurs pupilles vitreuses ; leur mouvements saccadés étaient ceux de pantins de chair, manipulés par une force invisible. Sur leur front, une étrange main poignardée y était représentée. Vêtus de suaires et de linceuls, ces esclaves du vide s'apprêtaient à sacrifier leur proie : l’enfant.

Pris de vertige, cette réminiscence s'interrompit laissant le corps de la demoiselle fébrile et fiévreux. L'esprit d'Alastor, troublé par les évènements qu'il venait d'entrevoir, se laissa emporter par un profond sommeil.

************************************************************

Mercredi 18 septembre, 7 heures du matin, la jeune fille se réveille sous les appels incessants de sa mère.

"Lève-toi tu vas être en retard, le petit déjeuner est prêt, dépêche-toi de te préparer."

Affublée d'une coiffure hors du commun, la demoiselle, dans un élan de courage, parvint à se lever. Après qu'elle eut rafraîchi son visage innocent, un profond bâillement vint ponctuer la fin sa torpeur. A son entrée dans la cuisine un bol de chocolat chaud l'attendait encore fumant, ainsi qu'une salade de fruits exotiques.

Contrairement à son habitude, une faim étrange la tenaillait : elle dévorait goulûment tout ce qui se présentait à sa vue ; outre la salade de fruits et le chocolat, elle réclama deux bols de céréales, une bouteille de jus d'orange et un paquet de cookies. Subjuguée par la voracité de sa fille, la mère l'observa pendant quelques instants, les yeux écarquillés. Elle avait du mal à la reconnaître, mais cet appétit insatiable ne l'inquiétait qu'à moitié. Elle qui craignait que son enfant ne dépérisse.
Le repas une fois achevé, la demoiselle fila dans sa chambre pour se préparer, le vieux livre était posé sur la table de chevet. Elle le saisit et le mit dans son sac d'école.

" C'est le livre que j'ai trouvé hier, pensa-t-elle, je devrais peut être essayer de le lire dans le bus." Et c'est ce qu'elle s'empressa de faire une fois à l'intérieur.
" Tiens tiens tiens, pas de titre !"

Mais au moment où elle s'apprêtait à tourner les premières pages, une personne pour qui elle nourrissait une profonde inimitié vint s'asseoir auprès d'elle : une cousine répondant au nom d'Alexandrine. Elle avait le même âge que Ludivine, elle était blonde, yeux verts, de taille moyenne et lourde comme un tonneau de vin.
"Alors, le sac d'os toujours à l'école et célibataire ? Ton cas est vraiment sans espoir ! " -La malveillance constituait la base de son éducation.-
Ludivine fit mine de l'ignorer : le regard de sa cousine se fit alors plus insistant, il demeurait fixé sur elle avec une envie de nuire assumée.

Soudain, Ludivine se vit arracher le livre des mains par sa cousine, laquelle l'ouvrit sans attendre. Elle prit une page au hasard et commença à lire ce qui y était inscrit:

"Les remous du fleuve se font plus violents que jamais, pourtant nous semblions avoir fait le nécessaire en apportant la pierre comme convenu. Ce Vespérus nous avaient pourtant assuré que le rituel serait une réussite..."

Elle s’interrompit : à mesure qu'elle lisait les phrases disparaissaient, et à sa grande stupeur une paire d'yeux sombres se dessina sur les pages du livre qu'elle tenait.

Les yeux, d'un gris argenté, semblaient refléter quelque chose, mais à son grand désarroi, elle ne parvenait pas à en distinguer la forme. Soudain, ces derniers se fermèrent puis se rouvrir brusquement, tous dégoulinants de sang. Son reflet apparut sur les pages mais celui-ci était dépouillé d’enveloppe charnelle.

A cet instant, une voix monstrueuse et sifflante résonna dans sa tête : elle susurrait en gémissant : « Repose-moi si tu ne veux pas finir en sac d'os !»
Toute tremblante, Alexandrine rendit le livre, le tout accompagné de ses plus plates excuses, à la grande stupéfaction de sa cousine qui la regardait éberluée par cette transformation aussi soudaine qu'invraisemblable.

Le trajet se termina dans le calme et sans encombre.

Ludivine rangea l’ouvrage dans son sac. Elle descendit du bus à la place de Verdun. Elle n'était plus qu'à quelques minutes de marches de l'université. En marchant son coeur battait la chamade : elle se fatiguait très vite. Un accident cérébral n’est pas sans conséquence, dans son cas : 4 mois d'hospitalisation et l’interruption de ses études. Aujourd'hui, c'était la reprise ! Pas question donc d'être en retard ! Il lui fallait absolument réussir cette année qui lui tenait tant à coeur.

Arrivée devant l'entrée principale de l'établissement, elle aperçut un de ses anciens professeurs qu'elle salua poliment. Celui-ci vint l'aborder de suite.

" -J'ai appris que vous aviez l'intention de revenir, je serai ravi de vous revoir parmi nous cette année ! C'est si regrettable à votre âge d'avoir une santé aussi fragile ! Ne vous inquiétez l’équipe enseignante a été avertie, tout se passera bien. Ne vous surmenez pas trop mais gardez votre sérieux." Mlle Maylie, professeur de philologie chinoise, professeure pour qui Ludivine éprouvait beaucoup de sympathie, était de ces individus qui ne cessaient jamais de sourire.


" -J'espère que les programmes n'ont pas trop changé, j'ai conservé mes anciens cours .


-Je vous rassure, mais que cela ne vous dispense pas d'être assidue et de prendre des notes ! On se reverra tout à l'heure dans l'amphithéâtre."


Suite à cette brève discussion, Ludivine alla consulter le tableau répartissant les étudiants par groupe. Cette année, elle allait devoir faire partie du groupe 4 dont le responsable n'était autre que M. Falaise, un professeur de philologie anglaise dont la réputation de sadique et d'opportuniste n'avait plus à être démontrée. L'an passé, il refusa la moitié des étudiants à l'examen final pour cause de retard. Ces derniers avaient été ralenti par un accident de la circulation qui avait coûté la vie à un père de famille : celui de Ludivine. Elle apprit la nouvelle le soir même par un coup de téléphone des services hospitaliers. Cet évènement transforma sa vie : elle ressentait l'envie de revivre en compagnie de son père disparu. L’absence, plus que tout, était un supplice. Sa personnalité fut donc très ébranlée : elle ne sortait plus que pour aller à la faculté, sans dire mot à qui que ce soit. Le deuil avait mué en mutisme, mutisme qui perdura. Puis, un jour , ou peut-être une nuit, elle sombra : sa mère la retrouva allongée sur le sol, immobile et tenant une clé à la main. Après deux semaines de coma, elle se réveilla très affaiblie. A peine échappée d'un cauchemar qu'un nouveau se présentait : 4 mois de rééducation pour recouvrer ses capacités et une mémoire instable.

"Alors...le premier cours du groupe 4 aura lieu en amphi 350 B à 9 heures et sera administré par...oh non c'est Falaise qui déboule, eh bien l'année commence bien !" pensa-t-elle. Elle éprouvait une telle appréhension à l'égard de ce personnage qui était aussi insupportable que gras : son corps était à la minceur ce que le hamburger est à la gastronomie, et son caractère si colérique et sans aucune patience accompagné de sa voix de siphon suffisaient à faire peur aux étudiants les plus teigneux. Elle se souvenait malheureusement très bien du premier cours dispensé l'an passé par "cet imposant individu",pensait-elle alors avant de rentrer dans son antre. Si la prise de contact avec les étudiants avait été très originale, de cela tout le monde en convenait, elle n'en fut pas moins d'une rare violence. Voici quelques perles rares du discours de présentation qui avait été le sien un an auparavant :

"Bonjour tout le monde, je m'appelle M. Falaise ce qui est un nom très barbare car je suis français ! " ou bien "Je viens de Poitiers, une ville couverte de crottes de chiens, mon bureau pue et mes collègues me pourrissent la vue !" , ou encore "Comme vous êtes en 3ème année de Licence, j'espère que vous n' êtes pas comme ces bébés de classe prépas ! Je vous préviens manquez un seul de mes cours et je vous mettrai un zéro à votre semestre !" ; il avait conclu sa présentation par : "Avez-vous peur ?", sur ce point, là aussi, tout le monde s'accordait pour répondre "oui", et ils avaient raison.

"Bien, mieux vaut ne pas arriver en retard, j'ai déjà assez de problèmes comme ça !"

Elle se dirigea d'un pas saccadé vers l'amphi 350 B, une guillotine l'y attendait peut-être ?
Un étrange bruit attira son attention, il provenait d'une salle annexe dont la porte était restée entrouverte : c'était M. Falaise, il semblait débattre vigoureusement avec Mlle Maylie.

Avant de pouvoir aller jeter un oeil à la scène, la porte se ferma violemment. Ludivine sursauta de terreur : quelque chose d'étrange se passait : quelqu'un l'appelait à partir de son crâne. Une voix fragile, presque enfantine, gémissait et tremblait. Affolée, elle se rendit aux toilettes pour rafraîchir son visage qui avait pris une teinte rouge vif. Elle fixa son reflet dans le miroir. Il n'y avait rien de particulier au premier abord, elle prit une grande inspiration puis ferma les yeux. Elle eut alors une impression étrange : celle de ne pas les avoir fermés car elle se revoyait dans les toilettes. Le miroir quant à lui n'était plus à sa place : sur le sol gisaient des morceaux de verres ensanglantés par des bouts de chair sectionnés. Les gémissements reprirent en accélérant, puis les morceaux de verre s'élevèrent du sol et vinrent se poser contre le mur avec une précision d'orfèvre pour reconstituer le miroir brisé. Ludivine le regarda, elle y vit tout d'abord une brume épaisse puis deux lumières jaunes. "Sûrement une voiture", mais celle-ci roulait à une vitesse très élevée, comme pourchassée par la brume. Quelques secondes plus tard ce fut l'accident. Le brouillard se leva, laissant apparaître les morceaux d'une Citroën Xantia éparpillés sur le sol. Le corps de la victime ayant été éjecté par le choc était méconnaissable : la moitié du crâne avait été atrocement séparée du reste du cadavre. Ensuite, accoururent les secours puis les forces de police, puis s'en suivit un énorme embouteillage, les automobilistes s'impatientaient d'autres étaient atterrés par cette vision. Cette scène ne fut pas sans lui rappeler l'accident de son père l'année dernière, et ce fut le cou noué par la peine et le visage ruisselant de pleurs qu'elle referma les yeux. A son retour une main posée sur son épaule apparaissait sur le reflet du miroir. Elle appartenait à un petit garçon d'une dizaine d'année. Celui-ci lui sourit et lui dit de ne pas pleurer avant de disparaître du reflet argenté.
La sonnerie retentit, signalant la reprise des cours. Ludivine se rendit immédiatement à l'amphithéâtre 350 B. Arrivée dans la grande salle, elle prit une place au hasard en cherchant du regard quelques visages familiers : pas une âme ne semblait lui évoquer de souvenir. Elle sortit ses affaires sans y prêter attention car de son sac, c'étaient des anxiolytiques qu'elle cherchait, ces substances censées apaiser ses nerfs, substances qu'elle appelait ses "cachets bleus". Elle en prit un avant l'entrée du professeur qui avait déjà dix minutes de retard, cependant que de nouvelles têtes continuaient de faire leur apparition. Parmi celles-ci, il y avait une jeune fille nommée de Danae. Elle était blonde, les yeux couleur de jade et dotée de beaucoup de caractère : à 22 ans elle était déjà partie en Chine, en Inde et au Japon. Les envieuses la disaient arrogante mais ceux qui prenaient le temps de faire sa connaissance la trouvaient plutôt enjouée et d'une intelligence remarquable.
En voyant Ludivine assise elle prononça un salut très sonore puis vinrent les questions et les explications :
" -Je pensais être la seule à refaire ma deuxième année en allant en Chine ! Je ne comprends pas tu as toujours été brillante élève. Même Coline qui passe son temps à faire la fête a été reçue ! Je me demande ce qui a bien pu se passer pendant mon absence!
-J'ai eu un accident cérébral pendant la semaine d'examens et j'ai été dans le coma pendant trois semaines suite à cela.
-Putain ! dit-elle comme pour s'excuser.
-Mon père est mort dans un accident de voiture un peu avant, je crois que c'est ça qui a tout déclenché." Elle continuait sans expression comme si elle s'était préparée à répondre à ce genre de questions, puis voyant le visage de sa camarade défait par ce qu'elle achevait de relater, elle s'empressa de conclure par un "Ca va mieux maintenant.".
-Et ces anxiolytiques c'est parce que tout va bien aussi !?
-J'ai juste des douleurs au crâne de temps en temps, mais rien qui ne se soigne pas avec des cachets bleus ! "
A cet instant M. Falaise pénétra dans la salle avec nonchalance. Il avait l'air fatigué et très affaibli et aussi étrange que cela puisse paraître, il commença son discours par des excuses du fait de son retard.

"Bien alors voici une brève bibliographie avant d'entamer cette nouvelle année, dit-il en allumant le rétroprojecteur, comme vous pouvez le voir nous insisterons particulièrement sur la linguistique et sur la littérature anglaise du XVIII ème siècle. Je vous invite à lire le programme attentivement avant toute chose."

A mesure que le professeur expliquait en détail le contenu du cours, Ludivine eut l'impression de renouer avec un quotidien, tout cependant lui semblait fané : le décor de l'amphithéâtre, les discussions imbéciles, les regards affairés de ceux du premier rang, absolument tout. Son amie n'osait pas la regarder, l'idée de son absence tout comme l'image des médicaments la mettaient mal à l'aise. Elle tentait de s'imaginer la détresse que l'on pouvait ressentir face à la perte d'un être cher. Cette détresse avait cependant trouvé un corps pour s'y incarner et ce corps était assis à ses côtés, indiciblement serein.

Le cours prit fin, les deux jeunes filles investirent les lieux d'aisance pour y échanger quelques banalités sous la lumière estivale qui se dissipait. L'automne s’annonçait :
" -Tu parles d'un premier cours! commença Danaé.
-Il a changé ce sale type, il était plus sadique que ça l'année dernière.
-Il se rattrapera sur nos copies je te parie. Au fait les étudiants d'Histoire de l'Art organisent une soirée d'intégration vendredi soir, ça te dirait de venir avec moi, je te présenterai mes nouveaux potes.
-Pourquoi pas, j'ai rien de prévu alors..."

Un portable sonna, Ludivine répondit :

" -Oui j'ai vu l'heure qu'il est, c'est bon attends un peu j'arrive. A toute suite !" -Elle raccrocha.- Ma mère m'attend devant la fac, on s'appelle via MSN ce soir ok?
-D'accord. Oublie pas la soirée pour vendredi.
-T'inquiète, c'est ma mère qui va sauter au plafond mais c'est pas grave."
Ludivine alla rejoindre une voiture garée sur le parking de l'université. Sa mère attendait à l’intérieur : elle avait l'air rongée par l'angoisse et dès qu'elle aperçu sa fille elle lui ouvrit la portière en disant :
" -Tu dois passer un scanner je te signale, c'est juste une vérification de routine alors on va éviter la nervosité si tu veux bien, prends exemple sur moi, déclara-t-elle toute crispée.
-Je suis confiante, le docteur m'a expliqué que mon état allait s'améliorer petit à petit.
-C'est parti, direction hôpital Gilbert des Vieilles Roches.

Après une demi heure de route la voiture s'arrêta. L'hôpital n'était plus qu'à quelques mètres, l'angoisse se lisait sur le visage de maman mais étrangement Ludivine semblait indifférente comme anesthésiée. Elle ne laissait paraître aucun signe d'inquiétude et se dirigea vers l'hôpital, décidée. Une fois à l'intérieur ce fut elle qui s'adressa à l'hôtesse d'accueil et le docteur Ryan la reçut quelques 5 minutes après, chose extrêmement rare. Le docteur Ryan avait déjà eu affaire à elle puisque c'est lui qui était en charge de sa rééducation. Il mena Ludivine et sa mère dans la pièce où le scanner était entreposé. Ludivine s'allongea sur la banquette en plastique et une assistante vint l'attacher pour l'immobiliser, la banquette se dirigea alors vers l'intérieur de ce qui ressemblait à un lave-linge. Après l'opération, le verdict tomba : plus une seule cellule endommagée.

" -J'ai beau chercher je ne vois rien, théoriquement vous devriez pouvoir vous souvenir maintenant." Mais rien à faire, elle ne parvenait pas à se remémorer ne serait-ce que les habits qu'elles portaient ce jour là.

" -Bien je ne vois pas l'utilité de vous faire passer un autre scanner avant disons 3 mois sauf bien sûr si vous éprouvez d'ici là des douleurs particulières et certains troubles sensoriels. Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter un prompt rétablissement et une bonne rentrée universitaire. Madame, mademoiselle, au revoir." Et le docteur prit congé d'elles sans autre cérémonie. Ludivine était perplexe, mais sa mère éprouvait un tel soulagement qu'elle dit à sa fille :
-Demande-moi n'importe quoi ce soir, c'est oui!
-N'importe quoi tu dis?
-Dans la limite du raisonnable cela va de soit.
-Eh bien Danae m'a invité à une soirée vendredi, je peux y aller?
-C'est d'accord, mais attention avec l'alcool, et aussi...
-Mesdames, un autre patient attend pouvez-vous vous dépêcher le docteur Ryan va revenir d'un moment à l'autre, intervint l'assistante.
-On en discutera dans la voiture." Mais finalement, elles n'en discutèrent pas et rentrèrent à la maison. Pas de cours l'après-midi le jour de la reprise, c'était la tradition, cela signifiait pour Ludivine la possibilité de reprendre se remettre au dessin.

Fusain en main, elle décida de faire le vide dans son esprit et de tracer la première image qui se présenterait à elle : elle commença par dessiner le visage d’un enfant ainsi que celle d’un démon lui faisant face. Le visage semblait appeler à l’aide cependant que le monstre prenait forme, elle s’empressa donc de rajouter au jeune garçon un corps et une épée, laquelle se trouvait plantée dans le coeur de la bête. L’enfant arborait désormais le sourire de la victoire et le démon celui de l’agonie. Les lèvres du monstre remuèrent pour prononcer ces quelques mots : " Ahrnarëk crisus teryú thaä ". Une traduction se fit immédiatement dans son crâne : "Le cri de l’esclave s’est tu.". Des souvenirs réapparurent soudainement : son père, ancien archéologue à la retraite avait entreposé des objets issus de fouilles qu’il menait aux alentours de La Rochelle dans un vieux monastère de l’an 1000. Elle se rappela s’être rendue au laboratoire qui se trouvait dans le sous-sol de la maison le lendemain de sa mise en terre. Elle y avait trouvé quelque chose d’inattendu car les recherches semblaient porter sur d’anciens rituels druidiques, mais le plus inquiétant était ce message gravé sur une stèle ornée d’ossements et d’écailles de poisson : "Seithmar ourfeg mor Mirna ", ce qui d’après la traduction de son père signifiait : "Le savoir se paie par la vie.", à côté de celle-ci il avait ajouté la note suivante "Que personne ne le retrouve !".

Ludivine posa le fusain et se leva. Elle se rendit au sous-sol, mais la porte d'entrée du laboratoire était fermée. Elle se souvenait d'avoir été la dernière personne à y avoir mis les pieds. Sa mère descendit les escaliers à son tour pour l'y retrouver.

" -C'est là que je t'ai trouvé lorsque tu es tombée dans le coma. Tu sais, c’est Patrick qui a récupéré les recherches de ton père. Ils ont travaillé de nombreuses fois sur les mêmes projets. Maintenant si tu veux bien, on va remonter, j'aime pas te voir ici, ça me rappelle trop de mauvais souvenirs.
" -Je peux savoir pour quelle raison tu as fermé cette porte ?
-Eh bien ton père n’étant plus, ce lieu est devenu son sanctuaire à présent et maintenant remonte."

Ludivine s’en fut aussitôt dans sa chambre, elle retira de son chevet une boite à musique. Son père la lui avait offerte à l’âge de 10 ans. En ce temps-là, elle rêvait de devenir danseuse étoile. Elle ouvrit le coffret et laissa la mélodie enchanter son esprit : le sommeil la gagna rapidement. Avant de fermer les yeux, elle répéta ce qu’elle murmurait, enfant :

"Les étoiles me manquent."

*************************************************************


  
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z653z  Ecrire à z653z

2012-07-26 16:53:16 

 ajouter une suiteDétails
voilà ce qu'il faudrait à ce texte.

J'attendais la possession de Tom et aussi plus d'interventions d'Alastor.
Le texte est assez captivant et plein de mystères.
J'espère une suite pour enrichir ce commentaire.

Au rayon des bricoles :

A son coup pendait - cou

Ses yeux céruléens occultaient mal une certaine angoisse et ce en dépit de l'air impassible qu'il arborait habituellement - manque de ponctuation

récupéré ses esprits - je ne sais pas si ça se dit

rose pastelle - pastel

son calme solennelle - solennel

Mercredi 18 septembre, 7 heures du matin - Pourquoi cette date au milieu de l'histoire ?

se fermèrent puis se rouvrir - rouvrirent

tous dégoulinants de sang - j'aurais mis tout

Ludivine rangea l’ouvrage dans son sac -
Curieux pour quelqu'un qui comptait le lire dans le bus.

professeur de philologie chinoise, professeure pour qui - répétition et incohérence de genre

"On se reverra tout à l'heure dans l'amphithéâtre" - et on ne la revoit pas de la journée

Ces derniers avaient été ralenti - ralentis

Comme vous êtes en 3ème année de Licence - redondant

les automobilistes s'impatientaient d'autres étaient atterrés - des automobilistes

ces substances censées apaiser ses nerfs, substances qu'elle appelait - répétition

cependant que de nouvelles - pendant que

sur le visage de maman - problème de narrateur

que les habits qu'elles portaient ce jour là. - elle portait

cela va de soit - soi

Danae m'a invité à une soirée - invitée

la possibilité de reprendre se remettre au dessin - redondant

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Antarès  Ecrire à Antarès

2012-08-02 21:56:57 

 Je suis tellement bête que je me vomirais parfois !Détails
Oups, ça fait vraiment beaucoup de bricoles pour le coup ! J'ai honte.

J'ai écrit une suite, mais une suite qui appelle encore une autre suite...Rhaaaa !
Merci en tout cas. Je corrige et je vous soumets la suite en espérant qu'elle soit moins truffée d'âneries...

Par contre, il y a des répétitions que je garde, notamment celle de "substances".

"Cependant que" ne me semble pas incorrect en l'espèce.



EDIT : Je suis désolé mais je ne peux plus éditer le texte originel. La fonction "éditer" n'apparaît plus.

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Antarès  Ecrire à Antarès

2012-08-02 23:51:42 

 La petite suite inachevéeDétails
Le sommeil avait gagné la chambre. La boite à musique s’était tue et le calme apaisant du repos était rythmé par la respiration régulière de l’occupante. De minuscules filets de larmes s’échappaient de ses yeux clos alors que les rideaux de lin couleur ivoire et ébène s’écartaient. Derrière les fines fenêtres, une pleine lune zébrée de nues occupait le ciel de minuit. Lentement, le corps de la dormeuse s’éleva de son lit tel un vampire lévitant au-dessus de sa couche sépulcrale. Sur les murs roses et décolorés par la lumière cendrée se dessinaient les ombres charbonneuses de cheveux gigantesques. En deux mesures, le son d’une harpe brisa le silence : Alastor était de retour dans ce corps, rappelé par ses maîtres.
"_Nous savons ce que tu as vu, nous étions présents avant que tu ne perdes connaissances ! déclara une voix morne. Il n’est pas prudent de continuer Alastor, mais la décision t’appartient.
_Le Conseil est formel, coupa une autre voix, tu as été envoûté par le sommeil. L’origine du sortilège est encore inconnue. Il s’est manifesté par l’entremise du codex relié que tu as ouvert ! Imbécile ! Ne sais-tu pas que ces objets peuvent renfermer de grands pouvoirs ?!
A cet instant le reflet de Yué apparut dans le miroir de la commode, son inquiétude n’était cette fois plus dissimulée.
"_Quelle est ta décision ? demanda-t-il.
_ Je continue, répondit le jeune garçon avec fermeté.
_ Dans ce cas, par sécurité, nous allons devoir t’accorder une protection avec un nouvel outil... Tends ta main la plus habile ! Tout de suite !
Alastor s’exécuta et rapidement les veines de son bras droit d’emprunt devinrent de plus en plus visibles : elles gonflaient à vue d’oeil. Ses ongles devenaient encore plus longs et prenaient une couleur jaune safran. Des éraflures vinrent entailler sa peau de jeune fille et son sang coulait abondamment sur le sol. Le liquide ainsi répandu se concentrait en une masse informe et spongieuse qui grossissait à mesure que le bras se vidait. Puis le saignement prit fin, les plaies se refermèrent, les ongles retrouvèrent leur aspect originel et les veines se firent discrètes, seule une masse mouvante et ensanglantée bouillonnait sur le sol : des molécules gazeuses s’élevèrent en un tourbillon carmin. En son centre, un bras desséché flottait. Sa chair était parsemée de trous, et sa main, composée de six doigts immenses, ne cessait de remuer. À son extrémité, des ongles argentés et menaçants étincelaient d’une lueur livide, telle le métal intrigant d’une épée.
"L’Appendice de Survie. Je l’ai confectionné moi-même, il y a 500 ans de cela ! " intervînt la voix sinistre d’un vieillard fripé.
Vêtu d’une étrange toge de cendre, sa silhouette était élancée et son visage dissimulé par une longue chevelure. Des colliers de racines et de vers pendaient à son cou. La chair de ses bras apparaissait dénudée et tatouée d’innombrables visages qui gesticulaient de terreur. Ganté tel un médecin légiste, ses mains contrastaient avec la texture mouvante de ses bras.
"_Permets-moi de me présenter : je suis Vespérus Crématur. On me nomme aussi le Maître du Crépuscule. Protecteur des terres sacrées de Walda et membre du Grand Conseil.
L’outil qui t’attend a été conçu à partir du corps d’un mage redoutable qui s’est laissé corrompre par l’ambition. Il s’appelle Albert Vern, nous le croyons vivant encore de nos jours, il se cacherait sur l’île maudite du Deemonian. Je lui ai moi-même arraché ce bras lors de notre affrontement. Par la suite je me suis servi de sa propre chair que j’ai investie de mes pouvoirs... Voyons, ne vois-tu pas qu’elle t’appelle ? ! Va la voir si tu souhaites que les pouvoirs qu’elle contient te soient transmis. Quand tout sera accompli, un bras de fumé jaillira de ton dos et te prêtera... "main forte" ! Hahaha !!! "
Obéissant, Alastor s’approcha du membre dont les doigts semblaient l’inviter à le rejoindre. Arrivé à un pas de la chose, il constata que les symboles d’Uranus et de Saturne liés par un même cercle y étaient tatoués. Résolu à réussir son examen, Alastor serra la main en état de déconfiture organique : les deux paumes se touchèrent et l’accord physique et symbolique fut conclu aussitôt. Alastor, secoué de spasmes, sentit le membre cadavérique pénétrer sa chair. Il lui était impossible de relâcher ce qu’il venait de saisir. Progressivement, le bras flottant s’évaporait pour ne laisser dans la main de l’enfant qu’un gant serti d’un cerceau argenté et dont les contours dessinaient une pleine lune traversée de nuages ; nuages symbolisés par des cordes métalliques. L'aire du cercle était recouverte d'un liquide moiré qui se troublait à la moindre résonance. À sa surface, un poignard minuscule et fort discret était relié au cerceau par ses extrémités. Il lévitait caressé par des eaux troubles.

De façon très subtile et progressive, une aura commença à étendre sa chaleur depuis le dos d'Alastor.

"J'en ai fini avec toi : je vais devoir m'éclipser, quelques tornades de soufre m’attendent... Je te laisse en compagnie de Yué, ton Initiateur."
Le mage du crépuscule s’en alla en un claquement de doigts. Alastor se retourna : son maître se tenait désormais devant lui. Son visage était éclairé par la lumière blafarde de la lune et non plus par le globe argenté qui lui pendait au cou.

"_Sacré Vespérus, ses méthodes sont toujours aussi singulières ! commença-t-il par dire.
_ Je vous entends... fit la main d’Alastor.
_Ah ah ! J’oubliais... Je suis là pour te conseiller. Où est ton matériel ? Tu vas devoir effectuer quelques prélèvements. Prendre le pouls de l’air, vérifier la sudation des murs, examiner les écailles des eaux. Il te faut mettre en application mes enseignements. Ce qui veut dire : sel de rosée, creuset azur sur le Saint-Elme et bien entendu, nous allons commencer par ton oeil de sève ! Allons bon qu’attends-tu pour citer la formule ? !
_Cercles démêlés aux vérités cristallines, J’invoque ton pouvoir dans la nuit opaline, Le volcan du creuset crépite sous l’assaut, Du Saint-Elme réveillé par le feu du faisceau. Terre, matière gisante, ombres sculptées d’éclats, Traversez le silence, surprenez nos yeux las !"

A cet instant, des murs, du plafond et du sol, jaillirent l’essentiel d’alchimie et une flamme irréelle baptisée ‘‘Saint-Elme’’. Alastor prit son oeil de sève et le plaça dans un creuset tapissé de sel de rosée. Après quelques crépitements sourds, le faisceau de feu fit apparaître une poudre aux propriétés surprenantes. Depuis des temps immémoriaux, les mages de Walda la considéraient comme « le murmure des choses défuntes ». Paradoxalement elle redonnait vie aux éléments éteints pendant une très courte durée, ceux-ci, réactualisant leur "mémoire" délivraient leurs secrets avant de s’évanouir de nouveau, ravalés par le silence. Cette poudre extraordinaire ne fonctionnait que sur la matière dite ‘‘trépassée’’, c’est-à-dire inhabitée par le souffle magique. Une minuscule pincée suffit pour faire apparaître un écran de brume : la mémoire des choses se profile depuis le néant sur l’écume du ciel.

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Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2012-09-03 22:43:47 

 Commentaire Antarès, exercice n°109Détails
Comm Antarès, Wa n°109



En te lisant, j’avais comme un sentiment de déjà vu – de déjà lu. Et pour cause. Tu as publié ce texte en Participation libre, le 1° février 2009. Alors certes, la WA 109 proposait de réécrire un texte. Sauf que ce texte-ci ne comporte que de très vagues modifications par rapport à ce texte-là. Quelques phrases tronquées, quelques rares ajouts, quelques phrases trop longues scindées en deux. Pas vraiment une réécriture. Je n’avais pas commenté ton texte à l’époque, et je me souviens très bien pourquoi : il m’avait laissée franchement perplexe. Je vais donc le commenter aujourd’hui.
L’idée de base est intéressante. Dans un monde magique, un enfant doit passer son épreuve initiatique en prenant possession de deux esprits humains, pendant un temps limité, pour les aider à améliorer leur vie. Le premier paragraphe, qui présente le héros et expose l’intrigue, se déroule sans encombre. C’est cohérent et clair, et ça se lit avec plaisir.
La suite, malheureusement, ne tient pas les promesses du début. On s’enlise dans des détails insignifiants qui alourdissent le texte et n’apportent rien à l’intrigue. Tu donnes des informations en double (l’accident vasculaire). Le lecteur piaffe d’impatience et comble de frustration, le texte s’arrête au même endroit que la première fois, sans que l’intrigue ait beaucoup avancé.
Mes conseils : réduis la mission de ton héros à une seule personne ; augmente son temps d’intervention ( 4 h par jour ça ne laisse pas beaucoup de champ) ; supprime tout ce qui est inutile (les deux profs), raccourcis à tour de bras l’arrivée à la fac, la rencontre avec Danaé, le scanner... Oublie les détails genre amphi 350 B, qui n’apportent rien ; introduis des changements de rythme, phrases plus courtes, voire réduites à quelques mots. Et surtout, termine cette histoire, ne fût-ce que pour te prouver que tu peux le faire. Avoir une idée intéressante est à la portée de n’importe qui . Mais écrire est un véritable travail, avec de la sueur et des larmes. Aucun écrivain ne peut y échapper, pour génial qu’il soit.

Bricoles :
- Alastor se réveilla : on n’a pas l’impression qu’il est endormi
- Il contemplait : contempla
- Après qu’eut fini : eût ; une voix qui finit... ait fini de parler, encore, ou se soit tue
- Comment Alastor peut-il savoir ce qu’est une chambre de petite fille sur terre ?
- Rose pastelle : rose pastel
- Intrigait : intriguait
- Ne sachant quoi y trouver : ça veut dire quoi ?
- Son calme solennelle : solennel
- La jeune fille se réveille : dans un texte écrit au passé
- Ponctuer la fin sa torpeur : de ; exemple type de la phrase inutile
- Ce Vespérus nous avaient : ce... avait, ou ces... avaient
- Ces derniers se fermèrent : c’est trop loin de « les yeux »
- Se rouvrir : se rouvrirent
- Quelques minutes de marches : marche
- En marchant : répétition
- Ne vous inquiétez l’équipe : ne vous inquiétez pas, l’équipe
- Professeur ou professeure ?
- Répartissant les étudiants par groupe : groupes
- L’an passé il refusa : il avait refusé ( c’est le passé du passé)
- Avaient été ralenti : ralentis
- Questions de cohérence :
Vous êtes en 3° année de licence, dit le prof ; je pensais à être la seule à refaire ma 2° année, dit Danaé.
L’accident vasculaire s’est produit pendant la semaine d’examens ; mais l’accident du père, qui a eu lieu avant, se déroule le jour d’un examen de fin d’année.
L’accident vasculaire a lieu en fin d’année scolaire ; 3 semaines de coma, 4 mois de rééduc : pourquoi elle ne reprend pas en décembre ?
- Il commença son discours par des excuses du fait de son retard : il commença son cours en s’excusant de son retard
- Indiciblement serein : pourquoi indiciblement ?
- Pourquoi les filles discutent-elles dans les toilettes ? Ca fait deux scènes à cet endroit-là. La 1° il fallait un miroir, d’accord. Mais pour la 2°, ça apporte quoi ?
- L. alla rejoindre une voiture... sa mère l’attendait à l’intérieur. Essaie d’éviter les évidences ! Ludivine rejoignit sa mère, qui l’attendait sur le parking au volant de sa voiture.
- Dès qu’elle aperçu : aperçut
- Direction hôpital Gilbert... L. sait où elle doit aller. Quel intérêt pour la mère de le lui dire ? Ton info, tu peux la mettre ailleurs. L’hôpital Gilbert... n’était plus qu’à quelques mètres.
- Le scanner n’est pas entreposé, ou alors c’est qu’il ne fonctionne pas. Il est installé
- Longtemps que je n’ai pas vu un scanner, mais ça m’étonnerait qu’on attache un adulte sain d’esprit
- Plus une seule cellule endommagée : la précision du scanner ne va pas jusque là !
- Les habits qu’elles portaient : elle portait
- La possibilité de reprendre se remettre au dessin : ?
- La porte d’entrée du laboratoire : la porte suffit
- Etait fermée : à clef, je suppose
- C’est là que je t’ai trouvé : trouvée


Je reconnais que je n’ai pas été tendre avec toi. Mais j’ai été honnête. Il faut absolument que tu t’astreignes à aller à l’essentiel ; les détails que l’on donne, dans une histoire, doivent avoir du sens, soit pour marquer les jalons de l’intrigue, soit pour créer une ambiance. La fac fascine peut-être les lycéens, mais ceux qui n’y sont pas allés s’en fichent, et ceux qui y sont allés l’ont rarement trouvée passionnante. Que le vilain prof devienne gentil sous l’influence d’Alastor, c’est vraiment un détail insignifiant par rapport à la mort du père ou à l’accident de ton héroïne – dont d’ailleurs on ne saisit pas bien quel est le problème : l’angoisse ? le syndrome post-traumatique ? le livre magique ? un mystère concernant les recherches du père ? De la matière, tu en as. Mets-la en valeur, et ça pourrait devenir passionnant !
Narwa Roquen, toujours aussi pénible...

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