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 WA-Exercice 79 - Description de la Nature. Voir la page du message Afficher le message parent
De : Onirian  Ecrire à Onirian
Page web : http://oneira.net
Date : Mercredi 11 aout 2010 à 11:05:15
En retard, naturellement, mais présent, encore.

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Amor Fati


Tout commence par une lumière particulière, un instant, suspendu, juste avant la disparition du soleil et la naissance de la première étoile. C'est là que se trouve la clef, la réponse aux mystères qui grondent en mon coeur. Il m'a fallu longtemps pour trouver la porte, et plus longtemps encore pour en forcer la serrure.
Tout commence par la lumière. Il est tard, et comme à chaque fois, je suis à l’aube de ma renaissance. Pour cette fois encore, c'est une lisière de forêt que j'ai choisi. Mais avant d'y entrer, je me délecte de ce ciel qui s’écroule. Le soleil, disque incandescent, s'est dissimulé derrière la courbe sensuelle des collines qui dessinent l'horizon. Ses rayons s'attardent cependant, accrochant les nuages du lointain pour y faire naître un océan de mondes, îles affleurant à la surface d'une mer en négatif. Les tons sont chauds, rouge, orange, sur un fond bleu nuit qui danse avec un mauve improbable. Le monde est vivant, ces terres célestes, imperceptiblement, se meuvent, gagnent du terrain, se dissolvent en leurs sommets. Je me sens baigner dans cette clarté qui s'assombrit et je l'accepte. Je laisse le jour me quitter, se désagréger en moi et accompagner les traits déjà mourants qui pourtant embrasent les cieux en un final spectaculaire.
Entre chien et loup. Un frémissement.
Je ferme les yeux... Je suis le courant, il m'entraine. Le chant nocturne semble naître en moi tandis que mes oreilles se mettent à le percevoir. Sons. Criquets, cigales, sauterelles... Un millier d'insectes participent à cette symphonie continue. Ils sont un, et pourtant tous uniques. Au fur et à mesure que mon ouïe s'affine, je peux accrocher, choisir une note dans cette mélodie sans cesse renouvelé. Là, un cri faible mais perçant, l'heure des chauves-souris. Il me semble presque percevoir les battements d'ailes, toile rapide, mouvements précis, à gauche, envol, plongée, virage, proie.
Je m'éloigne, le vent dans les arbres... Les yeux ainsi fermés, l'on pourrait presque croire qu'il s'agit de la lente respiration de l'océan, sac et ressac, force immuable, paisible et infinie. Je m'éloigne un peu plus, et un ruisseau nait dans le lointain. Il a toujours été présent, mais je le découvre, encore. Loin de l'immensité de l'océan végétal, c'est ici une comptine qui chatouille l'oreille, quelques accords subtils, un écureuil qui se faufile de branches en branches, un mulot qui défie les racines.
Un frisson me parcours l'échine. Je n'ai pas froid, mais la nuit m'envahit, s'empare de moi. Je n'oppose pas de résistance. Approche...
Avec la nuit, viennent les odeurs. Comment décrire ce monde olfactif ? Je pourrais parler de soirs d'été, de musc, de chaleur, de branches chauffées par le soleil, de la tiédeur paisible qui suit la fournaise. Je pourrais sans aucun doute évoquer des feux de camps, des soirées autour d'un barde improvisé, des chants amicaux, des rires, et le goût de l'insouciance. J'imagine qu'évoquer le loup tapis au coeur des ombres, les chemins qui côtoient les cimetières, les ombres découpées par un ciel trop sombre pour être encore le soir et trop clair pour se nommer nuit, ne serait pas de trop pour colorer ce tableau. Et pour finir, accompagnant toutes les autres, l'odeur unique, parfaite, sublime, de la liberté.
Mes yeux sont encore fermés, le monde a quasiment fini sa transformation. Sans qu'il ne me soit nécessaire de les voir, je devine les constellations, diamants scintillants ornant la voute céleste, et je sais que, trônant en bonne place, la Dame Blanche tourne son regard vers moi.
La forêt m'appelle, mais ce chant est doux à mes oreilles. Elle m'attire, et je la désire.
Je me lève. L'herbe crisse légèrement sous mes pieds, c'est une caresse délicate. Je me réjouis déjà de la danse langoureuse que m'offrira la terre, et, quand la forêt me prendra dans ses bras, des arabesques olfactives qu'elle m'offrira. Le vent m'apporte les effluves d'un lieu primitif, protégé. Je sais que ce monde pourrait être violent, bestial, mais j'ai ma porte et j'ai ma clef. J'ai fait le choix du beau.
Alors je sais que je pourrai me tourner vers Elle, et je me donner sans restriction. Je transforme la malédiction en cadeau, le sang en vie, le chien en loup.
Je respire et la tête m'en tourne. Il est l'heure, enfin. J'ouvre les yeux, et je te regarde, Lune, ronde comme le ventre d'une mère, et d'Elle, par Elle, pour Elle, je sens monter un cri du tréfonds des âges, une clameur sauvage qui hurle la beauté du monde, et quand il explosera, pour une nuit encore, je ne serai plus homme, mais loup.

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Onirian, qui aime le crépuscule.


  
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Réponses à ce message :
Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen

2010-08-11 23:02:27 

 Commentaire Onirian, exercice n°79Détails
C'est Magnifique! Trop court, bien sûr, toujours trop court quand on aime, mais le texte se suffit à lui-même, c'est juste un moment d'extase... donc toujours trop court...
L'ambiance du crépuscule est délicieuse, vivante, vibrante, sensuelle, précise et poétique à la fois. Quel talent! J'ai mis du "joli" partout en marge, le commentaire pourrait être plus long que le texte!
J'adore le mélange trouble entre le vu et le ressenti, ça rend bien la confusion du crépuscule... entre chien et loup... Mais ce qui me touche le plus, c'est la force vitale du loup, si heureux de renaître, tellement amoureux de la vie, de sa vie libre... Ca, c'est vivifiant, c'est jubilatoire, c'est dopant!


Bricoles:
- un instant, suspendu: enlève la virgule, c'est mieux
- renouvelé: ée
- de branches en branches: de branche en branche
- un frisson me parcours: parcourt
- des feux de camps: de camp
- le loup tapis: tapi
- la voute: la voûte


Je suis ravie! C'est un texte excellent, envoûtant, magique! C'est dans la fantasy que tu dois persévérer. Travaille! Tu as vraiment tout ce qu'il faut pour réussir!
Narwa Roquen,accro!

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Estellanara  Ecrire à Estellanara

2011-03-23 17:16:33 

 Exercice 79 : Onirian => CommentaireDétails
Tiens, je ne la connaissais pas cette locution latine. J’ai bien aimé ce texte. Le style est agréable. Cet intermède se suffit à lui-même en effet. J’aurais aimé peut-être des comparaisons plus inédites que soleil / disque incandescent et étoiles / diamants scintillants mais je reconnais qu’innover quand tant de choses ont déjà été écrites relève du défi. La métaphore Nature / amante est intéressante ; tu aurais pu la développer, je trouve. La fin sonne joliment et, rétrospectivement, ton titre est judicieux.

Estellanara
Urashima-Taro est sorti de la mer...

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