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De : Narwa Roquen  Ecrire à Narwa Roquen
Date : Mercredi 25 juin 2008 à 17:27:31
Tendresse en herbes




....
Rodolphe ne s’était pas calmé pour autant. Cet imbécile de Martin était tombé beaucoup trop vite, il n’avait même pas eu le temps de vider sa colère en lui administrant une bonne correction - comme autrefois. Alors, tout bouillant encore de rage, il attacha son cheval devant la maison de sa mère et s’en fut voir sa soeur.
Dora ravaudait des chausses sur le pas de sa porte. Elle esquissa un sourire en voyant s’avancer Rodolphe au pas de charge, l’oeil étincelant et les poings serrés. De son air le plus innocent, elle demanda :
« Tu viens dîner avec nous, mon cher frère ? »
Il se campa devant elle, les poings sur les hanches. Il ressemblait au petit garçon d’autrefois, qui bien que son aîné, venait toujours chercher du réconfort auprès d’elle. Il lui disait souvent « tu es trop petite pour comprendre », et elle le laissait dire, mais plus d’une fois elle lui avait prêté son mouchoir et mis de l’onguent sur ses bleus. Elle perçut tout de suite le chagrin sous la colère.
« Sûrement pas. Ton mari...
- Vous vous êtes encore disputés ?
- Il m’a insulté ! Il a insulté les armées du Roi ! Il a dit que j’étais stupide d’aller me battre, qu’il n’avait pas de temps à perdre avec moi... et il a refusé de ferrer mon cheval !
- Mon pauvre Rodolphe... Il devait être fatigué, sans doute, après sa rude journée... Mais c’est vrai que tu ne peux pas reprendre la route comme ça... Tu n’as vraiment pas eu de chance de perdre un fer sur un sol aussi sec... Car tu l’avais fait ferrer récemment, n’est-ce pas ?
- Mais bien sûr ! Cela fait à peine trois semaines ! »
Dora s’amusait beaucoup, sans que son visage trahisse la moindre ironie. Rodolphe était capable de mentir effrontément juste pour paraître à son avantage, et rien n’avait pu le guérir de ce travers. Elle avait vu arriver le cavalier marchant devant son cheval, et la pauvre bête avait les pieds beaucoup trop longs : son dernier parage devait remonter au moins à huit semaines. Elle n’était pas femme de maréchal pour rien...
« Eh bien, vraiment, quelle poisse ! Heureusement que ça ne t’est pas arrivé pendant les manoeuvres... Ecoute, laisse passer la nuit. Viens demain matin, nous déjeunerons ensemble. J’aurai du pain frais et du pâté de lièvre. Je suis sûre que vous pourrez vous entendre... »
L’homme bougonna dans sa barbe, puis, avec un sourire apaisé, déposa un baiser sur son front.
« A demain, petite soeur. »
Dora rentra dans la maison et ouvrit son armoire aux herbes. Dans un petit pot, elle mélangea, dans les proportions qu’elle connaissait par coeur, nénuphar, valériane, mélisse, coquelicot et marjolaine. Puis la main droite posée au dessus du récipient elle récita à voix basse une formule qu’elle tenait de sa grand-mère. En souriant, elle rangea le pot tout au fond de l’armoire.
Quelques minutes plus tard, alors qu’elle vérifiait que la soupe était chaude, arriva Martin, la lèvre fendue et la démarche incertaine.
« Oh, tu t’es blessé, mon amour ?
- Ce n’est rien. Pardon de t’avoir fait attendre. »
Elle l’embrassa légèrement, là où la lèvre était intacte, puis déposa une noisette de baume sur la lèvre et le menton.
Elle connaissait presque aussi bien son mari que son frère, et savait que Martin gardait volontiers ses tracas pour lui.
En servant la soupe, elle entama la conversation d’un ton anodin.
« Tu as vu Rodolphe, aujourd’hui ?
- Oui. »
Dora rompit encore le silence.
« Il a dû être content que tu referres son cheval. »
Martin avala deux cuillérées.
« Je ne l’ai pas fait. »
Dora prit l’air étonné. Le poisson avait mordu à l’hameçon, le plus dur était fait. Il ne fallait pas le brusquer, ne pas tirer sur la ligne.
« Tu dois être épuisé après cette longue journée. Qu’est-ce qu’il a fait chaud ! Tu seras plus à l’aise pour le faire demain matin à la fraîche.
- Je ne le ferai pas. »
Cette fois c’était à Dora de se taire. Il fallait que l’homme parle pour lui, elle ne devait pas l’aider davantage.
« Je suis désolé, Dora, je sais que c’est ton frère... Il m’a insulté, m’a traité de lâche... Il a été arrogant, prétentieux, hautain... Je ne suis pas son esclave. Je veux bien lui rendre service mais il peut au moins se montrer aimable ! »
Dora apprécia sa délicatesse ; il ne mentionnait pas le coup qu’il avait reçu. Ou bien avait-il honte de n’avoir pas su se battre ?
« Eh oui... Il a toujours été comme ça... Si ça pouvait lui servir de leçon...
- J’en doute. Et puis je ne suis pas son père, je n’ai pas à l’éduquer. Et je ne suis pas tenu non plus de supporter son mauvais caractère.
- Tu as raison. Mais celui qui va le plus en souffrir, c’est le cheval.
- Il n’a qu’à repartir à pied.
- Tu sais bien qu’il ne le fera pas... Je t’ai fait un clafoutis aux cerises, tu en veux ? »


Dora se leva avant l’aube. Elle prépara une infusion de sauge, pendant que le pain cuisait, et y versa son mélange de plantes. Le bruit des sabots dans la cour lui apprit que Rodolphe était là. Elle l’attabla devant le pain, le pâté, le clafoutis et la tisane, puis s’en alla porter un bol encore fumant à son époux. Quand celui-ci entra dans la pièce, avec le pas traînant d’un homme courbatu qui a quitté son lit à regret, Rodolphe lui sourit.
« Bien le bonjour, Martin. Bien dormi ? Pardon pour hier soir, j’ai eu tort de me mettre en colère.
- Ca ne fait rien ; j’étais fatigué et énervé moi aussi. Laisse-moi déjeuner, et puis nous irons ferrer ton cheval. Tu ne seras pas en retard ?
- Ca ira très bien, je te remercie. Je savais que je pouvais compter sur toi. On n’est jamais aussi bien que dans sa famille.
- A propos de famille », intervint Dora en posant ses mains à plat sur son ventre, « elle va s’agrandir... »
Les deux hommes cessèrent de mastiquer.
« C’est vrai ?
- Ca alors !
- C’est pour quand ?
- C’est merveilleux ! »
Martin se leva pour embrasser sa femme, Rodolphe se leva pour serrer sa soeur dans ses bras.
« Prends-en de la graine », pensa Dora à l’intention du petit être qui commençait à grandir en elle. « Un peu d’astuce, quelques herbes et de l’amour... Je t’apprendrai, mon enfant... Tu ne changeras peut-être pas le monde... mais tu auras la paix chez toi... »
Narwa Roquen,quelques grammes de douceur...


  
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Réponses à ce message :
3 Commentaire 39 et 40 - Elemmirë (Jeu 7 aou 2008 à 14:02)
       4 C'est bien écrit... - z653z (Jeu 11 sep 2008 à 12:25)


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