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 Répondre à : WA - Participation exercice n°118 - part III 
De : Maedhros  Ecrire à <a class=sign href=\'../faeriens/?ID=196\'>Maedhros</a>
Date : Samedi 6 avril 2013 à 21:43:46
3. DANS LE PALAIS DE SHEHERAZADE



La musique...

A travers ses paupières closes, une lumière filtre doucement. Il se sent comme engourdi. Il regagne peu à la peu la maîtrise de son corps et appréhende la réalité qui l'entoure. Il émerge lentement d'une somnolence fiévreuse. Il sent le drap tiré sur sa poitrine et ses mains sont posées sur du coton lisse et frais. Il est allongé dans un lit. Il se réveille d'un long et pénible sommeil. Il se souvient. L'escarmouche. La journaliste. Le sergent Myers. La mission. La tempête. Les souvenirs réinvestissent sa mémoire comme les eaux libérées du barrage. Il crispe ses doigts sur le drap. La douleur n'est pas partie. Elle est tapie quelque part, à la lisière de la perception. Il en faudrait peu pour qu'elle revienne elle aussi. Est-il... mort?

Il ouvre enfin les yeux. Un goût amer flotte sur sa langue pâteuse. Sa vision est encore trouble. La pièce semble assez grande et le jour intense est atténué par des persiennes à claire-voie aux abattants légèrement relevés. Les murs sont nus et blancs à l'exception d'une frise en mosaïque dont les tesselles de couleurs vives répètent un motif géométrique abstrait. Une sorte de longue guirlande de gouttes d'eau stylisées et arrangées par paires. Une étrange beauté s'en dégage. Une amphore trône sur son trépied et sert de vase à de magnifiques fleurs aux longues tiges sans feuille. Elles composent un feu d'artifice persistant où explosent en silence le rouge, le parme et le safran.

Il y a dans cette chambre à la fois épurée et pourtant riche de mille détails qui arrêtent le regard stupéfait du colonel, une délicieuse atmosphère de quiétude où il ferait si bon de se laisser aller pour des jours et des jours, sans rien demander de plus à la vie.

"Vous êtes réveillé?"

La voix est masculine indéniablement. Une voix grave et assurée. Une voix qui s'exprime dans un français presque sans accent. Angelson essaie de tourner la tête sur sa gauche mais la douleur qui irradie brutalement le fait grimacer. Il respire rapidement pour garder contenance.

"Attendez, je suis confus, je suis trop impatient!"

Un homme pénètre dans son champ de vision. Il a les traits fins et le teint olivâtre. Il n'est plus très jeune mais ses cheveux sont d'un noir de jais et ils bouclent sur son front. Il n'est pas arabe. Angelson l'a tout de suite remarqué. Il a le type... perse mais quelque chose dans ses traits puisent à d'autres racines, plus européennes.

Un Perse? L'Empire Perse ne porte pas dans son coeur les Royaumes du Hedjaz depuis que le général Lawrence, un ancien officier déserteur du Vereinigtes Königreich, propulsé à la tête des indépendantistes de la péninsule arabique, a vaincu à Al-Qadisiyya les armées achéménides qui avaient imprudemment pris pied du mauvais côté de l'Euphrate.

Un Perse. Sans doute un haut dignitaire. Sa tunique est en soie sauvage hors de prix, comme la lourde chaîne en or qui pend à son cou. A ses doigts brillent des bagues et des anneaux sertis de pierres précieuses. Angelson, malgré la torpeur qui ne s'est pas complètement dissipée, essaie d'ordonner ses pensées.

"Où sommes-nous?" demande-t-il et ces quelques mots sont presque une torture. Ses maxillaires le lancent terriblement.

"Vous êtes mon invité dans cette humble demeure qui est mienne, située non loin de Babylone." répond son hôte dans un sourire retenu qui laisse apercevoir la blancheur de ses dents.

Babylone. Angelson réfléchit aussi vite qu'il le peut. Il y a une sacrée distance qui sépare Hafar Al Batin et Babylone. Près de 800 kilomètres. Une frontière à traverser. Et pas n'importe laquelle. C'est l'une des plus surveillées au monde, les deux géants régionaux étant toujours officiellement en guerre, n'ayant signé qu'un armistice à la fin des hostilités. La guerre dura trente ans et a vu l'Euphrate charrier plus de sang que d'eau! Que diable fait-il en Perse? Il refuse d'accorder quelque crédit à son souvenir de tapis volant. Certainement des symptômes hallucinatoires post-traumatiques. Il n'a jamais volé sur un nuage à côté d'un ange.

"Monsieur, je m'appelle Lucien Angelson. Je suis colonel de la force impériale acadienne stationnée dans la péninsule arabique pour aider les gouvernements locaux à éradiquer le terrorisme. Pouvez-vous me dire comment je suis arrivé ici et où sont mes hommes?"

Lucien. Il aime modérément son prénom. Ses parents l'avaient choisi pour conjurer le côté trop anglais de leur nom de famille. Ils avaient pensé que le prénom d'un des frères de l'Empereur serait un gage de loyauté envers les Acadiens et qu'il lui offrirait un meilleur sort que le leur. Son père est un fermier des Grandes Terres du Milieu. Pour ne pas les chagriner, il ne leur a jamais dit que Lucien n'était pas forcément le choix le plus judicieux, les deux frères corses s'étant brouillés. Lucien n'avait jamais accepté de quitter Rome et sa femme, qu'il avait épousée contre la volonté butée de Napoléon. Lucien fut Prince mais un prince non dynaste. Ses descendants défilent aujourd'hui au pas de l'oie devant le Capitole.

Le Perse hoche la tête, en signe de compréhension. Il joint ses mains sous le menton et, après une seconde d'hésitation, il dit :

"C'est une histoire singulière que je vais vous conter, Colonel! Aussi, il est peut-être un peu tôt pour le faire. Vos forces reviennent certes, mais vous n'êtes pas en état de suivre une longue conversation qui va sans doute appeler de votre part de nombreuses et légitimes questions. Pour l'instant, sachez simplement que vous ne risquez absolument rien ma demeure. Au contraire, c'est moi qui pourrait être bientôt votre débiteur éternel. L'embuscade que vous ont tendue les Djihâdistes m'attriste profondément. Je ne partage pas cette inclination pour la terreur gratuite. Beaucoup de vos hommes ont péri. Quelques uns ont survécu, à ce qu'ont rapporté les médias. Ils ont été secourus après que... hum... la tempête se soit calmée. Par contre, vous étiez en grand danger, ainsi que votre sergent et cette jeune femme habillée comme un homme! Nous sommes intervenus juste à temps. Une balle avait perforé votre casque, en causant heureusement une blessure sérieuse mais non létale. Le sergent était encore plus mal en point. Sans soins appropriés, il serait mort rapidement. La journaliste était indemne mais elle est venue avec nous car elle était incapable de se défendre seule. Je dois dire que c'est une femme... remarquable et fascinante! Ah je manque à tous mes devoirs. Je m'appelle Javeed Anushiravan, Satrape de Babylone! Mes ancêtres remontent jusqu'au grand général Alexandre qui a conquis le monde connu au nom du sublime Roi Darius! "

Le fait de soutenir cette brève conversation a fatigué Angelson. Pris de vertige, il pâlit violemment, alertant le dignitaire perse. Celui-ci fait un geste impérieux et d'autres personnages entrent dans la pièce. Un médecin, aux petites lunettes rondes et cerclées, accourt au chevet du colonel et lui prend rapidement son pouls. Il sort de sa mallette une seringue intraveineuse déjà préparée et, avec une extrême douceur, injecte lentement son contenu dans le creux du coude du militaire. Une femme vêtue à la mode persane, sombre tailleur strict et voilette masquant le haut du visage, applique contre les lèvres d'Angelson un petit verre d'eau. Le colonel boit difficilement une courte gorgée. En soupirant, il renverse la tête contre l'oreiller.

Anushiravan tape dans ses mains et le couple disparaît.

"Bien, je vais vous laisser vous reposer. Il n'est pas encore midi. Ce soir, vous irez mieux et nous souperons tous ensemble. Je vous dirai alors tout ce que vous désirez savoir."

Le colonel acquiesce sans rien dire. Il ferme les yeux mais pose la question qui lui brûle les lèvres:
"Je suis ici depuis... combien de temps?"

Le Satrape le regarde longuement puis répond en ces termes :

"Cela fera presque six jours. Vous ne vous rappelez de rien. C'est normal. Nous avons dû employer un traitement... un peu particulier. A l'image de cet endroit, un peu particulier aussi! Mais n'ayez crainte, je vous le répète encore, je ne vous cacherai rien et vous serez libre de votre choix. Vous pourrez repartir d'où vous venez, avec vos amis. Vous n'êtes pas mon prisonnier. Mais j'ai besoin de vous!"

Ces mots jettent dans l'esprit d'Angelson une certaine confusion. Mais la drogue que lui a injectée le médecin produit son effet et le glisse dans une hébétude toute narcoleptique. Il bredouille quelques mots incompréhensibles. Le Satrape reste encore un moment près du lit, étudiant les traits maintenant apaisés d'Angelson.

Quand il est certain que celui-ci est inconscient, il sort de sa tunique un curieux instrument qui semble à la fois très ancien et pourtant en parfait état. C'est une sorte de petit pentacle en métal doré dont l'espace central est occupé par une étoile à sept branches. Anushiravan passe une main sur cet objet qui, à son contact, émet une faible lueur. Le dignitaire perse murmure tout bas et ses yeux s'emplissent de larmes. Il jette un dernier regard vers le militaire endormi.

Cela agira vite. Les prêtres médecins d'Ishtar sont réputés et reconnus partout dans le monde. Mais ceux qui travaillent pour lui n'ont jamais fréquenté le moindre colloque international. Ils travaillent sous les fondations de la grande ziggurat Etemenanki de Babylone, la Maison-fondement du Ciel et de la Terre. Ils possèdent un savoir bien plus grand, bien plus redoutable et peu sont ceux qui savent. Bien peu peuvent se flatter de connaître l'existence du Temple sous le Temple et celle des Adeptes de la Déesse. Mais Anushiravan est un puissant Satrape et même le Roi des Rois lui ouvre les bras quand il vient à la Cour.

Oui. Tous les signes le confirment. La conjonction est idéale. Les planètes sont parfaitement alignées, conformément au rituel. Une comète a surgi des profondeurs de l'espace et sa chevelure de feu flamboie dans le ciel nocturne depuis deux nuits déjà. Les dieux lui sont favorables. Il espère. Il espère de tout son coeur.

Il veut revoir Shéhérazade. Sa fille. La prunelle de ses yeux. Sa vie.

M
(à suivre...)

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